Deux années après la renationalisation du complexe sidérurgique d'El Hadjar, l'Algérie, à travers son groupe Imétal, a récupéré à titre gracieux la totalité des actions du groupe mondial ArcelorMittal. En effet, les deux parties ont défini un schéma d'accord pour la restructuration de l'actionnariat des sociétés ArcelorMittal Algérie (AMA), ArcelorMittal Pipes and Tubes Algérie (Ampta) et ArcelorMittal Tébessa (AMT) sans contrepartie effective. L'annonce a été faite, hier, par Abdessalem Bouchouareb, ministre de l'Industrie et des Mines, sur le site même du complexe, à la faveur d'une visite de travail à Annaba. «Cet accord permettra à la partie algérienne d'avoir le contrôle total des trois sociétés ArcelorMittal Algérie, ArcelorMittal Pipes & Tubes Algérie et ArcelorMittal Tébessa. Ce qui facilitera la prise de décision et la mobilisation des moyens, notamment financiers pour assurer le succès de l'opération de revamping des installations industrielles et leur redémarrage dans de bonnes conditions. Cet accord permettra également de stabiliser le climat social au niveau des trois sociétés, pour améliorer leur rentabilité et préserver les emplois», a-t-il estimé devant une armada de journalistes qui l'ont accompagné depuis Alger. De son côté, le groupe ArcelorMittal, à travers Davinder Chugh, membre de la direction générale du groupe ArcelorMittal et directeur monde du segment ACIS, a estimé : «Nous sommes satisfaits de cet accord conclu avec le gouvernement algérien avec qui nous entretenons d'excellents rapports de collaboration. Cet accord permet à ArcelorMittal Algérie, ArcelorMittal Pipes and Tubes et ArcelorMittal Tébessa de jouer un rôle-clé dans le développement de l'industrie sidérurgique et minière. Nous sommes heureux de pouvoir soutenir le gouvernement algérien à réaliser ce plan dans l'intérêt de la société et du pays.» Cette «recapitalisation», selon le ministre, «renationalisation», selon les économistes, entre dans le cadre de «la volonté du gouvernement algérien d'assurer la promotion et le développement de l'industrie sidérurgique nationale et contribuer positivement à son objectif de promouvoir l'autosuffisance en acier. Cette reconfiguration s'inscrit également dans le cadre de l'optimisation du portefeuille d'actifs d'ArcelorMittal». Satisfait également, le syndicat de l'entreprise d'AMA s'est félicité de cet accord. Amouri Noureddine, secrétaire général du syndicat de l'entreprise AMA, a déclaré : «Nous sommes, syndicat et travailleurs, très satisfaits de cette nouvelle orientation de l'Etat algérien. C'est une journée historique car notre rêve a été exaucé. Nous avons toujours réclamé cette option de récupérer les actifs du groupe ArcelorMittal en Algérie pour les remettre dans le giron de l'Etat algérien. En tant que partenaire social, nous œuvrons toujours pour assurer une stabilité à tous les niveaux pour réussir le plan d'investissement dédié à notre complexe et les autres unités.» Ce qui n'est pas l'avis de Me Lezzar Nasreddine, expert en arbitrage économique et avocat d'affaires. Pour lui, «cette cession à titre gratuit est manifestement suspecte. Les propriétaires du groupe ne sont pas des mécènes. Il faut savoir qu'une acquisition d'actions porte aussi bien sur les actifs que sur les dettes. Il fallait savoir avant d'accepter cette généreuse libéralité de procéder à un audit pour savoir si le groupe international n'est pas en déficit avancé, car en acceptant la totalité des actions, on prend en charge les dettes afférentes. Notre ministre annonce triomphalement une acquisition gratuite sans inventaire». Sur le plan juridique, ArcelorMittal transférera, dans cette configuration, ses participations minoritaires dans les deux sociétés ArcelorMittal Algérie et ArcelorMittal Tébessa ainsi que sa participation majoritaire dans ArcelorMittal Pipes & Tubes Algérie à la partie algérienne qui contrôlera de ce fait pleinement ces sociétés. Par ailleurs, ArcelorMittal va poursuivre avec le groupe Imétal, à la faveur d'un contrat, son assistance technique pour réussir le plan de développement du complexe d'El Hadjar. Les deux parties ont convenu de poursuivre leur collaboration en vue d'assurer la réussite des plans de développement des trois sociétés ArcelorMittal Algérie, ArcelorMittal Pipes & Tubes Algérie et ArcelorMittal Tébessa. Cet accord sera finalisé dans les prochaines semaines, où ArcelorMittal Algérie changera son appellation. Aussitôt annoncé, l'événement a été commenté par le Parti des travailleurs qui, par la voix de Smaïl Kouadria, député et ex-secrétaire général du syndicat de l'entreprise AMA, a estimé que «la décision du président Bouteflika de reprendre les actifs du groupe ArcelorMittal en Algérie est une victoire pour la nation, le pays et les travailleurs. Nous souhaitons que cette nouvelle orientation politique économique soit étendue aux autres activités industrielles, telles que le port d'Alger, les sociétés Alver d'Oran, Sovest de Tébessa et Eter de Guelma». Rappelons que le ministre de l'Industrie et des Mines, lors de son passage à Ferrovial, a déclaré que cette entreprise recevra bientôt un contrat de fourniture de plusieurs wagons destinés au transport du minerai, depuis les mines de Tébessa, pour le bénéfice d'AMA.