Après la publication d'un ouvrage sur les 50 ans de la bande dessinée algérienne, notre confrère, le journaliste Ameziane Ferhani vient de sortir, aux éditions Chiheb International, un recueil de nouvelles intitulé Traverses d'Alger. A travers un style d'écriture des plus aérés, Ameziane Ferhani, qui est un brillant journaliste et responsable du supplément Arts et Lettres au quaotidien El Watan, possède le discernement nécessaire pour trouver la bonne formulation ou tournure de phrase. A travers Traverses d'Alger, Ameziane réunit treize nouvelles au contenu foisonnant. 236 pages suffisent à elles seules pour découvrir et apprécier un récit à mi-voix, une description dans le détail et une profondeur dans les termes. Avec le talent qu'on lui connaît et reconnaît, Ameziane Ferhani sonde les profondeurs du cœur et de l'âme dans leur moindre recoin pour décrypter Alger. Il se permet, même sans limites, toutes les fantaisies de l'imagination. Au niveau de la quatrième de couverture, il est indiqué qu'on y trouve dans ce recueil de nouvelles «les palpitations secrètes de la ville, sa beauté profanée mais vivace, la survivance de ses passés et ses douleurs affichées ou cachées. Enfin, son immense potentiel de désir et de la vie». A l'occasion de la parution de ce recueil Traverses d'Alger, une rencontre avec la presse a eu lieu, samedi dernier, dans la mythique bouquinisterie L'Etoile d'Or à la rue Didouche Mourad. Ameziane Ferhani nous confie en aparté que son dernier-né découle de la création littéraire. Il est clair que les souvenirs et la réalité prennent une part. Si Ameziane Ferhani utilise le réel, c'est une matière première qu'il transfigure, ensuite dans l'imagination et la création littéraire. Le recueil en question s'ouvre sur une première nouvelle intitulée Aux étoiles d'or . Ce lieu est une histoire qui lie l'auteur au bouquiniste Si Mouloud. Ce dernier exerce cette noble profession depuis 65 ans. Ameziane Ferhani nous précise que s'il écrit aujourd'hui, c'est parce qu'il a beaucoup lu. Et s'il a beaucoup lu, c'est grâce en partie à ce grand bouquiniste. «Pendant longtemps explique-t-il, on ne trouvait pas tous les livres qu'on voulait. Donc, c'était mon fournisseur de livres depuis mon plus jeune âge. Je voulais lui rendre hommage. Et à travers cette histoire, raconter mon amour pour le livre, même mon addiction». Son amour pour le livre est tel que Ameziane Ferhani l'assimile à une drogue. Il va même plus loin : «Je dis que la lecture exprime les secrets d'une personne les plus profonds. Je propose même dans la nouvelle qu'il y ait l'application du secret professionnel au libraire et au bouquiniste, comme pour les médecins et les avocats. Parce que quand vous allez chez un bouquiniste et vous lui demandez ce qu'un tel achète, vous saurez sur lui plus peut-être qu'il en sait sur sa personne.» Concernant les autres nouvelles abordées, aux titres révélateurs, parfois, de leurs contenus dont entre autres De l'origine des bruits, De l'échelle de San Pedro, La promesse de la place Kenndy, La fetwa de mon qantar ou encore Sidi Yahia ou la fin d'Alger, on retrouve plusieurs univers différents mais partageant un espace commun qui est la ville d'Alger. A la question de savoir pourquoi avoir attribué tel titre à son recueil, Ameziane Ferhani répond que «traverses», ce sont des traverses entre les lieux d'Alger, entre les périodes et les individus. Il y a des passerelles et des raccourcis. «J'aime bien, précise-t-il, cette idée de traverses. C'est une ville qui est en pente. Elle a une topographie très spéciale. Quand on connaît la ville, on peut faire des raccourcis à travers la ville. Cet esprit de raccourci, on le retrouve même dans les esprits des Algériens». Si ce recueil de nouvelles est bien construit, il n'en demeure pas moins que la réalité est bien présente. Il s'agit là d'une matière première qui est, par la suite, triturée. A titre d'exemple, le nouvelliste indique dans une même nouvelle, qu'on peut trouver deux ou trois personnages qui ont une réalité quelque part qu'il a rencontrés et qui lui sont proches ou non. Mais qu'il a fait rencontrer dans une intrigue ou une narration qui est inventée. Certaines nouvelles de Traverses d'Alger datent de cinquante ans. Car notre confrère écrit depuis l'âge de dix ans. Il nous confie qu'il n'a jamais voulu publier pour deux raisons. La première, c'est parce que c'est un grand lecteur. Il adore la grande littérature. A chaque fois qu'il écrivait quelque chose, il mettait l'écrit dans un tiroir. La deuxième raison : «Comme j'écris sur d'autres qui écrivent en tant que journalistes, j'ai toujours eu ce regard double, comme si j'avais une schizophrénie, car quand on écrit sur des écrivains, fatalement, à un moment, quand je termine, je me mettais dans la peau du journaliste que je suis et j'essayais de lire l'écrivain que j'essayais d'être. Et cela ne me plaisait pas. Il a fallu que mes proches me poussent à publier, notamment mes enfants». En somme, Traverses d'Alger, de Ameziane Ferhani propose des nouvelles croustillantes qui susciteront, à coup sûr, chez certains lecteurs, des souvenirs indélébiles à jamais. Il est à noter que Ferhani Ameziane présentera son recueil de nouvelles Traverses d'Alger aujourd'hui à 14h, à la librairie Chiheb International, à Bab El Oued.