Quatre jours après le début des fortes perturbations du réseau internet, Azouaou Mehmel, PDG d'Algérie Télécom, a décidé de communiquer sur cet incident. Il a annoncé hier, lors d'une conférence de presse, «le début, dans la nuit de samedi à dimanche, des travaux de réparation du câble sous-marin coupé depuis jeudi en milieu de journée au large de Annaba. L'opération de recherche entamée vers 23h a abouti au repérage et à la remontée du premier bout du câble sur le pont du navire câblier Raymond Croze à 5h22». Les travaux de réparation de ce premier bout du câble sous-marin ont été immédiatement lancés par les techniciens du navire et trois ingénieurs d'Algérie Télécom montés à bord. M. Mehmel a ajouté que «les opérations de recherche se poursuivent pour retrouver le deuxième bout du câble endommagé afin d'entamer les travaux de raccordement». En outre, une plainte contre X a été déposée hier par Algérie Télécom auprès du procureur de la République près du tribunal de Annaba. L'enquête judiciaire déterminera l'auteur de cette coupure qui a affecté le trafic de la bande passante internationale et causé des préjudices à Algérie Télécom et à ses clients. Pour atténuer l'impact de cette coupure qui a privé Algérie Télécom de 80% de la capacité de la bande passante internationale transitant via le SMWE4 à Annaba, des dispositions ont été prises afin de router le trafic vers le deuxième câble Alger-Palma dans les limites de ses capacités actuelles (80 Go). Dans un communiqué de presse, Algérie Télécom «s'engage à dédommager ses clients à hauteur des journées perdues depuis jeudi 22 octobre». Ainsi, a-t-on appris auprès de sources de l'entreprise, «100 mètres de câble ont été changés parce qu'ils ont été endommagés. Les techniciens ont procédé en outre à la vérification de la continuité entre la coupure et Marseille, et tout va bien. Les travaux ont commencé côté Annaba, pour repérer l'autre bout du câble». Trafic maintenu Mohamed Habib, directeur général adjoint d'Algérie Télécom, a déclaré que «la bande passante internationale est répartie sur les deux câbles sous-marins. Nous avons perdu 81% de notre trafic international : 325 gigas sont concernés par la coupure. Nous avons 425 GB disponibles, on a atteint en temps ordinaire le pic de 405. On ne peut utiliser maintenant que 80 gigas restants. Même si les gens ont la connexion, ils ressentent des effets sur la qualité. Nous sommes obligés de restreindre l'utilisation sur 80 gigas uniquement. Aujourd'hui, on a une politique qui consiste à répartir cette charge : deux liens de 10 gigas ont été réservés pour les corporates (entreprises et opérateurs) ; les autres liens sont dédiés aux particuliers. Pour les gérer de manière dynamique, nous faisons en sorte qu'une plage horaire du jour des clients d'une certaine région puissent avoir une bonne capacité de connexion». Pour M. Mehmel, «il faudrait sécuriser davantage notre trafic parce qu'aujourd'hui, avec son volume, il n'y a que la fibre optique qui puisse le véhiculer. Des solutions satellites ne pourront jamais véhiculer cette masse qui va en augmentant». Et d'ajouter : «On a un deuxième support à partir d'Alger sur Palma mais nous ne pourrons plus augmenter les capacités de ce câble : nous l'avons augmenté deux fois, il a été réalisé dans le cadre d'un consortium du temps du ministère de la Poste et des Télécommunications, associé avec trois opérateurs historiques européens que sont Telefonica, France Télécom et Telecom Italia et, à l'origine, c'était un 2,5 gigabits, il a été augmenté dans une première phase à 10 gigas, nous avons augmenté à 80 gigas unilatéralement. Nous ne pouvons plus continuer à cause de contraintes économiques. Algérie Télécom a initié le projet d'un troisième câble à partir d'Oran, lancé en 2009, malheureusement, les procédures traînent. Il est financé dans le cadre du plan Orsec sur budget de l'Etat. Le contrat a été signé récemment, l'ouverture de la lettre de crédit pour lancer les études sur le parcours du câble a été effectuée. On va passer à la phase pratique et nous avons sollicité le ministère pour proposer de réaliser une autre branche sur ce câble à partir d'Alger qu'on va financer nous-mêmes, on aura trois sorties, Annaba à l'Est, Alger au Centre et Oran à l'Ouest. A ce moment-là, nous aurons d'autres trafics internet à sécuriser en termes de capacités et de disponibilité. Les travaux commenceront en 2016.» Algérie Télécom a pour objectif, dans son plan de développement, d'augmenter ses supports pour sécuriser au maximum le trafic et offrir une meilleure bande passante. En cette période d'absence de service, l'opérateur a tenté de faire en sorte de permettre aux abonnés au moins de consulter leur messagerie. Pour M. Mehmel, «le trafic national internet n'a pas été interrompu, tous les sites hébergés en Algérie sont accessibles. Il n'y a que le contenu hébergé à l'étranger qui a cette contrainte de congestion. On est en train de gérer la bande passante pour permettre une gestion équitable de cette situation de crise». «Algérie Télécom a géré d'abord les opérateurs pour qu'ils ne soient pas impactés, puis le secteur économique : la majorité des clients professionnels n'ont été impactés que sensiblement et ceux qui se sont signalés ont été pris en charge, dont le secteur bancaire. Il restait une quantité de bande passante qui a été allouée aux clients résidentiels, mais ce ne sont plus les mêmes débits et capacités qu'ils avaient avant ; l'usager qui téléchargeait des contenus ne peut plus le faire, mais il y a la possibilité de consulter sa messagerie. Mais quand vous perdez 80% de bande passante, cela se ressent forcément.» Les clients seront compensés pour la durée de cette situation, précise la direction d'AT, sachant que «ce n'est pas une défaillance d'un équipement ou d'un support d'Algérie Télécom. On essaie de réduire de tels incidents». «Notre objectif est d'offrir une bonne qualité de service à notre clientèle. Peut-être que nous n'avons pas vu venir la vague internet. Facebook et YouTube (plus de 40% d'usagers) sont les plus utilisés.» «La vraie question est soulevée : bâtir une économie numérique nationale. Beaucoup de professionnels se plaignent, ils activent en Algérie et hébergent leurs sites à l'étranger», a conclu M. Mehmel.