Que reste-t-il des idéaux du 1er Novembre, au moment où le pays fait face à une crise politique et morale majeure ? Pour les partis de l'opposition, la Déclaration de Novembre est une chimère qui n'a existé que le temps de sa rédaction. Pour Moussa Touati, président du FNA, «l'esprit de Novembre» n'existe pas, car il a été détourné. «Les idéaux qui ont guidé la Déclaration du 1er Novembre ont été bafoués et trahis par nos responsables», juge le président du FNA. Et de poursuivre : «Si nous sommes parvenus à arracher le drapeau de la France de nos édifices, nos responsables continuent malheureusement à être attachés à l'ancien colonisateur.» «Si l'Algérie a arraché son indépendance, elle a échoué à obtenir son indépendance économique», enchaîne-t-il. Pour lui, «ce que De Gaule a été contraint de céder aux Algériens face à leur héroïsme, les Français ont réussi à le récupérer autrement.» Pour Moussa Touati, les fruits de la Révolution sont un grand gâchis imputable à nos dirigeants. «Si l'indépendance est un échec, cela est imputable aux responsables», déclare-t-il. Pour le porte-parole du Parti des travailleurs, Ramdane Youssef Tazibt, «la préférence nationale s'est transformée dans l'esprit de certains membres du gouvernement en préférence étrangère. Nous assistons à une forme de recolonisation à moindre frais. L'esprit du 1er Novembre a été poignardé dans le dos». Pour le dirigeant du PT, «certains ministres protègent les intérêts des pays étrangers.» Même diagnostic chez le président de Ahd 54, Ali Fawzi Rebaïne. Il estime que la Déclaration de Novembre est devenue un fonds de commerce permettant à «certains de se gargariser lors des festivités», alors que les idéaux «de justice sociale, d'égalité entre les Algériens, de respect des libertés», tels que mentionnés dans la Déclaration ont été bafoués. «Vous pensez que les martyrs de la Révolution se sont sacrifiés pour cette Algérie ? Je ne le pense pas. Ils ne l'ont pas fait pour que 5000 milliardaires voient le jour et pillent le pays. A mon avis, les martyrs doivent se retourner dans leur tombe.» Une analyse partagée par Ali Benflis, président de Talaie El Houriyet. Dans une déclaration, l'ancien Premier ministre juge que ceux qui dirigent l'Algérie ont bafoué les idéaux pour lesquels se sont «soulevés et sacrifiés les Algériens». «Le déclenchement de la Révolution de Novembre a eu lieu pour que le peuple puisse se réapproprier sa souveraineté, et pour l'établissement d'un Etat de droit qui protège et garantisse les droits de tous les Algériens», a-t-il déclaré. Et de se demander : «Que vaut la parole des Algériens dans la gestion des affaires de la nation ?» Dans ce concert de critiques et de scepticisme ambiants autour du 1er Novembre, les partis proches du Président montent au créneau. Ainsi, Seddik Chihab, porte-parole du RND, a fustigé, à partir de Mascara, ceux qui demeurent «sceptiques quant à l'atteinte des objectifs fixés par la Révolution de Novembre 1954», rapporte l'APS. Pour M. Chihab, «la Révolution algérienne a bien concrétisé ses grands objectifs que sont la liberté, l'indépendance et la préservation de l'identité nationale algérienne». Il estime que «l'Algérie est restée fidèle aux valeurs et principes de la Révolution et au message du 1er Novembre axé sur l'indépendance et l'édification d'un Etat fort sur les bases et les préceptes de l'islam, et en s'investissant dans le social». Pour sa part, le président de la République, dans son traditionnel message du 1er novembre, a estimé que la «Révolution de Novembre a marqué l'histoire contemporaine. En effet, au-delà de nos frontières, la Révolution de Novembre est l'objet de respect sur tous les continents, en hommage à la vaillance du peuple algérien en lutte, en reconnaissance de la fierté qu'elle a procurée à la nation arabe, et au regard de ce qu'elle a pesé dans l'accélération de l'indépendance d'autres pays africains.»