Situation inédite depuis 1999 au Venezuela. Ayant perdu les législatives de dimanche, le parti du président socialiste Nicolás Maduro, le PSUV, devra désormais cohabiter avec un Parlement qui lui sera défavorable. Après 16 ans de victoires ininterrompues du PSUV, c'est en effet l'opposition qui contrôlera le Parlement. Avec 99 députés sur 167, la Mesa de la Unidad Democratica (MUD, coalition des partis d'opposition) obtient la majorité simple à l'Assemblée et va donc pouvoir promulguer toute les lois qui lui tiennent à cœur. La première concernera la «libération des prisonniers politiques», notamment du leader d'extrême droite Leopoldo López, emprisonné depuis un an pour «incitation à la violence». La MUD pourra également demander des comptes au gouvernement révolutionnaire quant à la crise économique, les pénuries et la large corruption de ces dernières années. Pourquoi la défaite maintenant ? La population vénézuélienne semble avoir sanctionné le pouvoir chaviste, lors de ces législatives, pour son incapacité à trouver des réponses à la baisse vertigineuse des prix du pétrole. Une baisse dont elle a subi de plein fouet les effets, en témoignent les pénuries de produits alimentaires observées dans de nombreuses villes. Avec une économie en morceaux, les revenus pétroliers représentent 96% du budget de l'Etat vénézuélien. C'est la raison pour laquelle N. Maduro, le président vénézuélien, avait plaidé, avant la réunion de l'OPEP, vendredi dernier, pour une baisse de la production afin de faire remonter les cours qui ont perdu 60 % de leur valeur depuis un an et demi. En vain, comme tout le monde le sait. Une remontée des prix ces derniers mois aurait probablement pu permettre à son parti de garder la majorité au Parlement ou du moins d'éviter la bérézina qu'il vient de connaître. Au-delà de la défaite des chavistes, le point positif de cette élection est que les violences tant redoutées après une campagne politique belliqueuse n'ont pas eu lieu. Il y a eu officiellement 34 infractions électorales, dont cet homme qui a détruit une machine électorale, ou une attaque à la grenade qui s'est soldée par la mort de l'assaillant, lequel cherchait à abattre des militaires pour leur dérober leurs armes de service. Trois fois rien, surtout lorsque l'on sait que le Venezuela est l'un des pays les plus violents au monde. L'autre point positif est que le président Maduro a reconnu le résultat du scrutin. Il a toutefois évoqué une «victoire circonstancielle de la guerre économique menée par les spéculateurs capitalistes». L'opposition a fêté quant à elle le triomphe de «tout le peuple vénézuélien». Afin de rassurer les socialistes, le secrétaire général de la coalition d'opposition, Jesús «Chúo» Torrealba, a déclaré : «Nous saurons gérer cette victoire, nous le ferons sans écraser personne ni remettre en cause les programmes sociaux du gouvernement.» La défaite du chavisme survient deux semaines après une autre élection symbolique en Amérique latine, celle du libéral Mauricio Macri en Argentine, qui a mis fin à douze ans de pouvoir de Nestor puis Cristina Kirchner, grands alliés du chavisme avec qui ils avaient commencé un mouvement de basculement à gauche de la région à l'aube des années 2000. Maintenant, il s'agit de voir comment se déroulera la cohabitation politique au Venezuela. Une véritable épreuve pour la démocratie dans ce pays.