Une rencontre-débat avec l'écrivain et journaliste Ameziane Ferhani autour de son livre Traverses d'Alger a eu lieu samedi après-midi au siège de l'Association des anciens scouts de Tizi Ouzou. L'invité du Café littéraire et philosophique est revenu lors de sa présentation sur ses premiers écrits littéraires jusqu'à la publication des 13 nouvelles compilées dans ce recueil paru aux éditions Chihab. «Cela fait plus de 30 ans que j'écris des nouvelles, des récits et des réflexions qui ont fini dans des cartons et les fonds de tiroir. Pourquoi avoir attendu si longtemps ? La raison est que je plaçais la barre vraiment haut. Ce sont mes enfants qui m'ont encouragé. En ayant lu quelques-uns, ils m'ont dit : ‘‘Papa, ça ne peut plus continuer comme ça ! Nous trouvons que tes écrits sont publiables. Et puis, c'est aux lecteurs de les juger''. Suite à cela, j'ai déballé mes cartons et sélectionné trois ou quatre nouvelles que j'ai décidé de retravailler», confie notre confrère. Traverses d'Alger est une plongée en apnée dans la capitale où il est né, a grandi, travaillé et résidé. L'auteur révèle dans un style passionnant des bribes de sa vie, dépliant des souvenirs d'enfance, l'insouciance, les virées joyeuses chez Si Mouloud, gérant de la plus ancienne boutique d'Alger depuis 55 ans, ce haut lieu du savoir et de la lecture, le bon coin indiqué pour les accros du livre… rare. «Ce bouquiniste à qui j'ai rendu hommage a connu Albert Camus, Kateb Yacine et Mouloud Feraoun, entre autres», a affirmé le conférencier. La suite du livre est construite d'anecdotes et de regards croisés sur «les palpitations secrètes de la ville, sa beauté profanée mais vivace, la survivance de ses passés et ses douleurs affichées ou cachées. Enfin, son immense potentiel de désir et de la vie». Pour Ameziane Ferhani, ce recueil de nouvelles n'est pas de la littérature algéroise. Répondant aux questions du public, l'invité de la rencontre a estimé que la littérature pousse les gens à voir des choses qu'on ne voit pas. «Si on perd la capacité de s'étonner, c'est la vraie mort. La littérature doit pousser les gens à voir ce qu'on ne voit pas et à s'étonner. La soumission commence par l'absence de l'étonnement». L'école algérienne ? «Un drame ! On tue l'imaginaire de l'enfant à l'école et la liberté de son geste quand on lui demande de dessiner avec une règle. Même au sein de la famille, il n'y a pas d'expression de l'enfant». L'urbanisation anarchique d'Alger dépeinte dans son livre ? «Dans dix ans, la capitale ne ressemblera plus à rien», tranche d'un ton sentencieux ce diplômé en sociologie urbaine. Que ressentez-vous après la publication de cet ouvrage, lui demande une dame ? «Je me suis libéré de toutes ces histoires et souvenirs qui étaient dans ma tête. J'éprouve aussi du plaisir à rencontrer les gens là où j'ai animé des ventes-dédicaces». Pour continuer sur sa lancée, l'auteur apporte actuellement les dernières touches à un roman et une nouvelle. «J'ai envie d'avancer, communiquer avec le lecteur. Je ‘‘me'' remercie d'avoir attendu 30 ans pour écrire cet ouvrage», conclut Ameziane Ferhani.