Contrairement aux autres bidonvilles de la cité du Vieux-Rocher, qui continuent toujours d'alimenter la polémique, celui de Chabani reste le plus méconnu. Construit en retrait de la cité Daksi, à quelques encablures du centre commercial et de l'Office national des statistiques, le site se découvre là où se termine la route pour céder la place à une piste de terre battue. Un conglomérat de gourbis semble se lover frileusement derrière les bâtiments. Des rangées dispersées de murs en parpaings qui tiennent à peine debout, un toit de fortune et une clôture improvisée. Selon certains, près de 200 familles y ont élu domicile. Certaines sont là depuis plus de quinze ans, alors que d'autres y ont atterri depuis trois ans seulement. Il y a même des gourbis où s'entassent cinq familles. Une situation qui gonfle encore le nombre des taudis et complique la tâche des commissions de recensement de l'APC. On avance même que des familles sont venues s'installer en apprenant qu'un recensement des habitants était programmé en prévision d'un éventuel relogement. Depuis 1982, le bidonville, qui n'était qu'un regroupement de quelques habitations précaires, a grandi pour devenir un appendice tentaculaire des immeubles de l'entreprise Chabani, construits au cœur de la cité Daksi, au profit des autres habitants du bidonville de Sarkina, situé plus au nord. Ces familles ont été délogées pour la construction de la cité Sakiet Sidi Youcef, plus connue par la Bum. Entre tous ces mouvements « caravaniers » de la population, un autre bidonville est né pour sombrer durant des années dans l'anonymat. « C'est le seul lieu qui n'a pas bénéficié de l'intérêt des autorités pourtant au fait de notre situation. On a été recensés à plusieurs reprises. On attend toujours, mais il semble qu'on est complètement oubliés », conteste un vieux commerçant à l'entrée du site. Loin des yeux, le bidonville Chabani est loin des listes de relogement. Un mauvais sort qui semble lui coller comme une fatalité. Les conditions de vie sont précaires. Habitant pourtant non loin d'une artère grouillante, dans une cité en pleine expansion, les citoyens de Chabani continuent de boire de la seule source du quartier où les conduites d'évacuation des eaux usées poussent aléatoirement. Les maladies à transmission hydrique sont légion. La liste des problèmes est longue pour une population qui vit dans une situation tout simplement intenable.