La fuite des cerveaux se poursuit et le retour des compétences n'est guère assuré. Mohamed Yassina Ferfera, directeur du Cread, a évoqué hier, lors de la présentation d'un ouvrage collectif — De la fuite des cerveaux à la mobilité des compétences — publié commandé par le bureau de l'OIT à Alger, la faiblesse des capacités d'attraction des pays d'origine face à des pays développés qui pillent les ressources des pays africains. Le coordinateur de l'ouvrage collectif, Mohamed Saïb Musette, qui met en exergue le faible apport des compétences installées à l'étranger (300 seulement participant au PNR engagés par le ministère de l'Enseignement supérieur), critique l'article 51 de la Constitution qui ne facilitera pas le retour des compétences dans leur pays d'origine. Karim Khaled, sociologue et l'un des contributeurs à l'ouvrage collectif, parle d'un mythe et de l'existence d'un «foyer migratoire dormant» dans le pays où les cadres ne sont pas valorisés. Selon l'ouvrage du Cread commandé par l'OIT, le volume des migrants maghrébins de niveau supérieur dans le monde reste à ce jour inconnu, puisque les pays du Maghreb ne diffusent aucune donnée sur les migrations selon le niveau d'instruction. Mais il est possible d'avoir une idée de l'évolution de cette catégorie avec les variations observées dans les pays de l'OCDE (pays développés) qui acueillent autour de 90% de Maghrébins à l'étranger. Le volume des migrants ayant le niveau supérieur était de l'ordre de 585 000 en 2000, ils sont actuellement 853 000, soit un taux de croissance de 46%. Les ressortissants du Maroc, avec 397 000 migrants de niveau supérieur occupent le segment le plus important au niveau du Maghreb. En 2e position se trouve l'Algérie avec 37%, puis la Tunisie avec 12%. La Libye et la Mauritanie viennent en 4e et 5e positions avec 3% et 1% respectivement. Selon le document, le taux moyen des Maghrébins de niveau supérieur dans les pays de l'OCDE était de 9,2% en 1990 et il est passé de 17,6% en 2000 à 22,3% en 2010. La hausse la plus importante est observée pour l'Algérie, avec plus de 16% depuis les années 1990. Elle est suivie de la Mauritanie, avec 12%, mais le taux est resté stable entre 2000 et 2010. La Tunisie a connu une hausse de près de 10% depuis 1990, et le Maroc un écart positif de 5,4% entre 1990 et 2010. Quant à la situation en Libye, après une chute entre 1990 et 2000, le taux est reparti à la hausse en 2010 avec 12% de plus. L'essentiel des résultats présentés par les chercheurs réunis par le Cread a été résumé en cinq points : le phénomène de «brain drain» est devenu critique pour les cinq pays de l'UMA, selon les données de l'OCDE pour 2014 ; la fuite des cerveaux est fortement marquée pour les profils très prisés sur le marché international (ingénieurs et médecins) ; les dispositifs de lutte contre la fuite des cerveaux existent dans la plupart des pays du Maghreb ; les capacités de rétention des pays d'origine sont faibles face à la force des éléments attractifs des pays développés, en déficit de compétences et autres talents.