En marge de son déplacement à Oran en compagnie d'un groupe de députés français, Abdallah Zekri, membre du Conseil du culte musulman (CFCM) et chef de file de la délégation qui s'est rendue à Baghdad pour tenter de libérer les deux journalistes français, a bien voulu nous accorder cet entretien. Cela fait presque deux mois que nos deux confrères journalistes français ont été enlevés par des ravisseurs se réclamant de la mouvance islamique de la résistance irakienne. Etes-vous toujours confiant quant à la bonne issue de leur sort ? Selon les indices concluant les contacts que nous avons entrepris et que nous continuons à entreprendre, les deux journalistes français et leur chauffeur syrien sont actuellement entre de bonnes mains, sauf que l'anarchie et la tension qui règnent actuellement en Irak nous laissent pessimistes sur la durée et les circonstances de leur libération. Pourriez-vous être plus clair à ce propos ? Notre souci à nous, c'est que les otages français soient libérés dans de bonnes circonstances, or il se trouve que certaines forces souhaitent impliquer à n'importe quel prix la France dans ce conflit auquel elle n'a jamais pris part. Qui accusez-vous précisément ? J'accuse les Etats-Unis et l'actuel gouvernement irakien qui est à la solde des Américains. Nous avons l'intime conviction que ces derniers ne ménageront aucun effort pour faire avorter la libération des journalistes et leur chauffeur. A votre retour d'Irak, la délégation du CFCM dont vous faisiez partie, a parlé de plusieurs contacts que vous auriez eu à Baghdad, mais vous n'avez cité que celui du Conseil supérieur sunnite des oulémas. Pourriez-vous nous en dire plus à ce sujet ? Outre le conseil des oulémas, nous avons rencontré l'émir des salafistes qui nous a garanti que la vie des deux journalistes ne risquerait rien tant qu'ils étaient entre les mains des ravisseurs. Le plus important dans tout cela, c'est que nous avons été contactés par un messager du Majliss El Choura - l'instance suprême qui décrète les fatwas - qui nous a affirmé que les ravisseurs ont été appelés à préserver la vie des journalistes français et à bien les traiter en attendant leur libération. Certains observateurs de la scène politique doutent des vraies raisons de cette prise d'otages avancées par leurs ravisseurs, à savoir l'annulation de la loi relative à l'interdiction des signes religieux. La loi sur la laïcité n'avait rien à voir avec cette prise d'otages. Les contacts que nous avons eus en Irak nous ont confirmé cela. Les ravisseurs se réclamant de la résistance islamique irakienne soupçonnaient les deux journalistes d'être des espions travaillant pour les forces de la coalition américaine. Après que le gouvernement français est intervenu, confirmant que les deux otages étaient bel et bien des journalistes qui travaillaient pour leur organe Le Figaro et qui n'avaient rien à voir avec les Américains. Mieux encore, l'un d'entre eux vivait depuis presque 20 ans en Jordanie, et il était connu pour ses reportages anti-américains. Pourtant, certains milieux politiques français ont bien entretenu la polémique autour de l'histoire du voile. Effectivement, ce sont ces mêmes milieux à leur tête une poignée de députés de l'UMP dont Alain Madelin, qui ont appelé la France à participer à la seconde guerre du Golfe et ceux-là mêmes qui se sont opposés à la participation du président Abdelaziz Bouteflika aux festivités commémorant le débarquement des forces alliées en Normandie. Ces individus seront toujours au rendez-vous, afin d'entraver tout rapprochement entre la France et le monde arabe. Les services algériens ont-ils joué un rôle dans cette initiative ? Non, je n'ai reçu aucun ordre ni instruction de quiconque en Algérie. J'ai agi en tant que citoyen français qui s'est porté volontaire pour servir une cause noble. Quelle est votre position par rapport à l'amendement du code de la famille qui fait agiter les islamistes en Algérie ? J'ai représenté le président Abdelaziz Bouteflika en France lors de l'élection présidentielle du 8 avril dernier. Je l'ai soutenu sur la base d'un programme à travers lequel le président s'est engagé solennellement à amender le code de la famille qui, à mon sens, nécessite une révision totale. Cela dit, je lui lance un appel à ce qu'il honore ses engagements vis-à-vis de la femme algérienne qui en a marre d'être à chaque fois trahie.