Les habitants de nombreux villages de la localité ont quitté leur foyer durant les années de terrorisme. Les conditions d'un retour chez eux ne sont toujours pas réunies. Une grande tristesse se lisait sur le visage de Mohand Ameziane, un ex-garde communal à la retraite. Cet homme de 44 ans et père de famille que nous avons rencontré au village Imezdhourar, situé en contrebas de la RN30, sur les hauteurs de la commune de Saharidj, à 50 km au nord-est de Bouira, craint pour sa vie et celle de sa famille. La menace terroriste plane toujours. «Nous étions en première ligne dans la lutte contre le terrorisme et maintenant, nous sommes livrés à nous-mêmes», dit-il avec amertume. Au village, le siège qui abritait durant des années les éléments de la garde communale, dont le corps a été dissous fin 2011, est occupé actuellement par des militaires. Ce sont d'ailleurs ces soldats qui ont accroché, la semaine passée, un groupe terroriste composé, selon des informations fournies par des villageois, de trois éléments. Mohand nous montrait l'endroit où a eu lieu l'accrochage, où fort heureusement aucune perte humaine parmi les militaires n'a été déplorée. C'est à Islen, un bourg relevant administrativement de la commune d'El Adjiba et situé à 2 kilomètres de la localité d'Imezdhourar. «Nous avons réclamé des armes pour sécuriser nos familles et épauler ces militaires, mais aucune suite ne nous a été donnée», regrette notre interlocuteur, en saluant au passage les efforts des militaires installés au village. Les habitants craignent le retour des années de terreur. L'inquiétude se lisait sur tous les visages. L'insécurité règne encore dans la région, surtout à Islen, où le reste des habitants ayant bravé la peur durant des années ont décidé de quitter le village juste au lendemain de l'accrochage entre les militaires et le groupe terroriste survenu le 18 février dernier. En fait, deux familles ont abandonné leur village habité par le passé par plus de 300 familles. «On ne peut pas y aller cultiver nos terres et nos champs d'oliviers situés à Laâwnaser, Thissamoumin et Thouvrazine. On ne veut pas prendre de risques», témoignent des villageois en se remémorant les années noires et le début du terrorisme. C'était en janvier 1996, quand, sous la pression terroriste, l'ensemble des habitants du village Imezdhourar avait quitté la localité. «Nous n'avions pas d'autre choix. Il a fallu attendre deux années avant que des patriotes et autres groupes de légitime défense s'installent pour que les familles reviennent», témoigne-t-on. 20 ans après, et malgré le sacrifice des gardes communaux et la résistance des citoyens face au terrorisme, les villageois continuent leur exode. L'indisponibilité d'un minimum de commodités de base a obligé des familles à quitter la région. Dénonçant l'attitude des pouvoirs publics quant aux revendications exprimées par les villageois, tant sur le plan sécuritaire que sur celui du développement, les villageois menacés également par les chutes de pierres se disent lésés et abandonnés. «La bouteille de gaz butane, parfois introuvable dans les dépôts, nous revient à 350 DA, dès lors que nous sommes obligés de louer le transport des particuliers pour aller nous approvisionner en ce combustible au niveau des points de vente installés à Saharidj ou M'chedallah», dit un habitant, en soulignant au passage que la salle de soins du village n'assure aucun service, car elle est dépourvue d'équipements, de médicaments et de personnel médical. Retard de développement Nous quittons le village Imezdhourar pour aller à Illiten, à l'est du chef-lieu communal de Saharidj. Cette localité, qui abrite une population dépassant les 7000 âmes, endure un manque criant de commodités. Les travaux du réseau de distribution de gaz naturel sont à l'arrêt depuis plusieurs semaines. En période hivernale, les conditions de vie, d'après les villageois. Outre cette insuffisance, c'est une conduite en fonte longeant les flancs d'une colline qui constituent une véritable menace pour les citoyens. La canalisation descend presque à la verticale, a-t-constaté. Cette conduite en fonte a été réalisée en 1927 pour alimenter en eau la station hydroélectrique appelée «l'usine», équipée de turbines destinées à la production d'énergie électrique. La station en question, qui sert actuellement au transfert de l'électricité, est située en contrebas du village. Le système hydroélectrique avait été abandonné fin 1990 et les turbines qui fonctionnaient dans le passé avec les eaux de la source noire, ont été remplacées par un équipement moderne. La station en question avait été la cible d'un attentat à la bombe en 1995, qui a été déjoué grâce à la vigilance des villageois et surtout des éléments du Groupe de légitime défense (GLD). Ali Belkacemi, l'ex-maire de Saharidj, dira que cette station alimentait en électricité plusieurs régions du centre du pays. Quant à la conduite en question, l'ex-P/APC précise qu'il avait saisi à maintes reprises l'ancien wali de Bouira sur la nécessité de la supprimer, dès lors qu'elle constitue un véritable danger pour la population. «Aucune réponse ne nous a été donnée et la situation est restée inchangée bien que nous ayons relancé les autorités à ce sujet», dit-il, en soulignant qu'il avait même proposé la vente aux enchères de cette conduite. «La vente de cet équipement est l'unique solution et le montant est évalué à plusieurs milliards de centimes», explique M. Belkacemi. Il faut souligner que les autorités avaient récupéré un grand espace qui servait de bassin de rétention d'eau surplombant la localité d'Illiten, en le transformant en aire de jeu au profit des jeunes de la localité. Les villageois interpellent les autorités afin de solutionner le cas de cette conduite à l'abandon depuis une trentaine d'années. Un cas illustrant la défaillance des pouvoirs publics dès lors que ce sont non seulement des vies humaines qui sont exposées au danger, mais aussi un équipement «hérité» et qui peut renflouer les caisses d'une municipalité en quête de ressources financières.