Jeudi passé, grâce au collectif Les amis de Bachir Hadj Ali, Oran avait rendez-vous avec l'une des figures les plus marquantes de la lutte pour l'indépendance et militant de la cause ouvrière, le regretté Bachir Hadj Ali. La salle mise à disposition par l'association Numidia s'est révélée trop exigue pour accueillir les personnes qui ont connu l'homme, universitaires, travailleurs, retraités, militants ainsi que celles qui ne l'ont connu qu'à travers son œuvre littéraire. En vérité, aucun autre espace n'aurait été suffisant vu la stature de Bachir Hadj Ali et la symbolique qu'il représente. Le président de l'association Numidia a été très bref en situant le contexte lié au 25e anniversaire de la mort de Bachir Hadj Ali et en affirmant que ce grand militant des forces progressistes a imprimé une dimension nationale politiquement et culturellement. La rétrospective de la vie de Bachir Hadj Ali a révélé le parcours d'un Algérien authentique qui aspirait à la libération de son pays et à la liberté de son peuple. Ironie de l'histoire confisquée, son parti, le PCA, fut interdit par Ben Bella et il fut emprisonné, torturé et interdit de séjour dans les grandes villes, par Boumediène, dans son propre pays ! La lecture du poème Je jure a été passionnante tant l'émotion était grande comme à chaque fois que Bachir Hadj Ali s'adresse aux tortionnaires pour les rassurer «Je jure sur l'angoisse démultipliée des épouses, Que nous bannirons la torture, Et que les tortionnaires ne seront pas torturés». A suivi un déroulement de son œuvre littéraire où le style d'écriture singulier du militant poète a été décrit comme d'expression française profondément ancrée dans l'algérianité et ouvert sur l'universel. Les témoignages de ses amis évoquaient un homme humble, qui avait un sens très développé de l'écoute et de l'analyse. Ce qui ne l'empêchait pas d'avoir de l'humour. Pourquoi des figures comme Bachir Hadj Ali ne sont pas citées dans les manuels scolaires ? Telle était la question itérative des intervenants. La politique de l'oubli imprimée par le système est un «assassinat de l'histoire», dira un proche ami de Bachir Hadj Ali. Les débats ont brillé par des hommages poétiques à Bachir Hadj Ali et des pistes ont été proposées tendant vers une reprise en main par l'action de la lutte pour les libertés. Les participants ont été conviés à se revoir pour décider, comme première mesure agissante, d'une journée de protestation «contre l'amnistie de la corruption qui se prépare dans les arcanes du pouvoir». La rencontre a été clôturée par la lecture du poème «Rêves en désordre» de Bachir Hadj Ali. Un poème qui diffuse, à lui seul, tout un programme. L'auteur y expose sa vision d'une Algérie où la nature est pérenne, où la répartition des richesses trône en maîtresse, où le travail est savant, où l'Algérien vit dans un minimum de confort, où la femme et l'homme ne sont pas opposés mais partenaires dans un respect mutuel, où la femme a les mêmes droits que l'homme, où la culture et les sciences forgent l'esprit du citoyen, où l'histoire est assumée sans complexe, où les droits de l'homme ne sont pas uniquement ratifiés mais appliqués… Les amis d'Oran de Bachir Hadj Ali ont invité les présents à assister à une lecture rythmée de poèmes tirés du répertoire de Bachir Hadj Ali par de jeunes Oranais, le samedi 14 mai 2016, au siège de l'association Le Petit Lecteur.