Les pouvoirs publics semblent n'avoir retenu aucune leçon des erreurs commises dans la gestion des conséquences du séisme d'El Asnam en 1980. Bien au contraire, l'Etat aurait bel et bien décidé de reproduire l'échec et de rééditer le scénario de Chlef à Boumerdès. Sinon comment peut-on expliquer que 13 ans après le séisme de 2003, 12 413 familles — des cas sociaux, pas des sinistrés — vivotent encore dans des chalets dépourvus des moindres commodités. Annoncée depuis plusieurs années par le Premier ministre, l'éradication définitive de ces habitations provisoires n'est pas pour demain. Le directeur de l'Opgi, Omar Moualhi, fait état de 2504 chalets seulement qui ont été éradiqués depuis l'entame de l'opération de démantèlement en 2013. «Cette opération se poursuivra au fur et à mesure de la réalisation des programmes de logements inscrits. Nous avons entamé depuis quelques jours une opération de relogement de 2315 familles. Elle touche 12 communes et s'achèvera avant le Ramadhan», a-t-il indiqué. Selon lui, hormis les 60 résidants de la cité Oasis de Bordj Menaïel et ceux (24) des coopératives du 11 décembre à Boumerdès, lesquels ont opté pour l'aide à la reconstruction, tous les sinistrés du séisme ont été relogés dans des appartements en dur. Mais le pari est loin d'être gagné. Il y a deux ans, l'ex-wali, Kamel Abbas, promettait que pas un seul chalet ne subsistera à travers la wilaya à la fin 2016. Néanmoins, la chute des prix du pétrole a tout chamboulé. L'amenuisement des recettes en devises a vite incité le gouvernement à geler le programme des 8000 logements destiné au recasement des occupants des sites de chalets, devenus de véritables lieux cache-misère. Ainsi, sur les 12 000 logements prévus à cet effet, seuls 4000 sont en cours de réalisation dont 1500 à Bordj Menaïel, 1000 à Boudouaou, 1000 à Boumerdès et 500 à Dellys. Quand l'état se trompe de priorité Au lieu de «mettre la main à la caisse» pour effacer les stigmates du séisme, le gouvernement aurait préféré laisser les familles en question évoluer éternellement dans des bâtisses en bois dont la durée de vie est dépassée depuis six ans. «Pourquoi n'a-t-on pas gelé le projet de la grande mosquée ? Celui-ci est-il une priorité par rapport à notre problème ?» se demande Saïd Ghomrassi, un père de famille habitant un site de chalets à la sortie sud de la ville de Bordj Menaïel, qui se bidonvillise de jour en jour à cause de la prolifération des bâtisses illicites. Outre la dégradation de son chalet, Saïd se plaint de la propagation des fléaux sociaux, la détérioration du cadre de vie et l'absence d'infrastructures de base. Des problèmes accentués, selon lui, par la saleté, le mauvais état des routes, la pénurie d'eau et les fuites sur le réseau d'assainissement. «Cela fait plus de 8 ans qu'on nous a promis de nous reloger dans le cadre du programme de la résorption de l'habitat précaire, en vain», tempête-t-il. Son voisin, lui, dit avoir été mordu par un rat en précisant que les rongeurs et les sangliers font partie de leur quotidien. «Il n'y a personne qui mène une vie normale ici. Les gens ont perdu espoir et sont tous malades à cause du stress et la misère des chalets», confie-t-il. Les maux et les carences précités prévalent au niveau de tous (93) les sites de chalets éparpillés à travers 28 communes de la wilaya. En plus de leur dégradation, la plupart de ces habitations qui ternissement l'image de la région sont implantés sur des terrains à vocation agricole et des zones côtières qui devaient abriter des hôtels et des complexes touristiques, comme c'est le cas à Sahel, Figuier, Corso, Zemmouri et Dellys. C'est ainsi qu'on a compromis le développement économique de cette wilaya aux grandes potentialités agricoles et touristiques.