Les déficits budgétaires cumulés des pays du Conseil de coopération du Golfe (CCG) et de l'Algérie devraient, d'après les projections, atteindre près de 900 milliards de dollars sur la période 2016-2021. L'Algérie, l'Arabie Saoudite, le Bahreïn et Oman deviendront débiteurs au cours de ces années, leurs besoins de financement devant dépasser les réserves liquides dont ils disposent actuellement. Les projections prévoient aussi que les budgets de presque tous les pays non membres du CCG seront toujours déficitaires à la fin de la présente décennie. Les projections du FMI sur l'économie algérienne et celle des pays du CCG sont pour le moins sombres. L'Algérie, l'Arabie Saoudite, Oman et Bahreïn, dont les déficits sont les plus importants de la région Moyen-Orient, Afrique du Nord, Afghanistan et Pakistan (Moanap), devraient solliciter les financements extérieurs dès cette année pour pouvoir couvrir les dépenses, selon un rapport actualisé du Fonds monétaire international (FMI). Pour l'Algérie et l'Arabie Saoudite, les déficits budgétaires devraient se situer à près de 15% du PIB, tandis que ceux d'Oman et de Bahreïn bondiront à près de 20% du PIB. Le FMI craint que les récentes mesures destinées à réduire les déficits ne puissent suffire, d'autant que, à terme, «les marchés n'anticipent qu'une légère remontée à 50 dollars le baril d'ici la fin de la présente décennie». Une prévision entourée, néanmoins, de beaucoup d'incertitude, estime le FMI. La baisse prévue des recettes sur les cinq prochaines années réduirait les marges de manœuvre des pays exportateurs de pétrole. «La baisse prévue des cours du pétrole implique que les recettes pétrolières seront faibles pendant les années à venir, ce qui réduira considérablement la capacité de dépense des Etats», lit-on dans le rapport de l'institution de Bretton Woods. Financé des années durant en puisant dans les avoirs, le déficit ne pourrait plus être couvert par l'épargne, eu égard aux ponctions importantes effectuées l'année dernière dans l'épargne financière. En Algérie, les prélèvements sur le Fonds de régulation des recettes (FRR) se chiffrent à 665 milliards de dinars sur les deux premiers mois de l'année ; ils avaient atteint 2886,5 milliards de dinars en 2015, soit près de la moitié des dépenses budgétaires globales du même exercice. Sur les trois dernières années, le FRR a perdu environ 5000 milliards de dinars de ses ressources, soit près de 50 milliards de dollars. Son stock est passé de 7600 milliards de dinars en 2013 à environ 3000 milliards de dinars à fin 2015. Le FRR devrait terminer l'année avec un solde négatif. Quant aux réserves de change, l'unique indicateur de solvabilité du pays, elles sont passées de 193,269 milliards de dollars à fin juin 2014 à 136 milliards de dollars aujourd'hui, soit une ponction de près de 60 milliards de dollars en deux années seulement. Après les ponctions importantes effectuées depuis le début de la chute des cours pétroliers, le recours à l'emprunt extérieur est inévitable, selon le FMI. Pour l'ex-gouverneur de la Banque d'Algérie, Badredine Nouioua, l'endettement extérieur est non seulement inévitable, mais un complément de ressources est nécessaire pour la couverture des dépenses. L'équation est d'autant plus complexe qu'il est hasardeux de compter sur un marché de capitaux à l'état primitif. Le FMI n'exclut pas d'ailleurs l'augmentation des risques financiers internes dans les pays du CCG et en Algérie. La liquidité du système financier risque de se poser, tout comme la qualité des avoirs bancaires, avertit le FMI. A l'issue de la dernière tripartite, le gouvernement s'était montré beaucoup plus affirmatif sur la question de l'endettement extérieur. Il en a fait une option. En effet, la tripartite de dimanche dernier a validé l'option d'«un nouveau mode de financement de l'économie, conférant une place importante aux ressources du marché, aux épargnes disponibles et aux financements extérieurs préférentiels». Cela veut dire que dès cette année, il y aurait déjà les premières négociations autour d'un emprunt extérieur, voire plusieurs. Ces prêts visaient à compenser la fonte de l'épargne financière et à endiguer une baisse plus rapide des réserves de change. D'autant plus que les mesures prises par le gouvernement — baisse des dépenses et des importations par-ci, remise en cause des subventions par-là — n'ont pas encore permis de rétablir la viabilité budgétaire. Le FMI a rappelé l'impératif de réduire la dépendance à l'égard du pétrole. «Le modèle de croissance actuel qui repose sur la redistribution des ressources par les pouvoirs publics n'est plus viable», fait constater le FMI, soulignant la nécessité «d'approfondir les réformes structurelles pour favoriser la diversification et la croissance des secteurs non pétroliers».