Bien que natif de Sousse, Hamdi Lagha évolue en France depuis quelques années déjà. Une rencontre en marge du Festival international de musique symphonique d'Alger. Comment avez-vous basculé dans l'univers du chant lyrique ? Je me suis initié à la musique, tout seul, en autodidacte, jusqu'à l'âge de douze ans. Par la suite, à l'âge de quinze ans, je me suis inscrit au conservatoire. J'ai fait de la musique arabe et occidentale. J'ai toujours été attiré par les arts classiques et le jazz. Je suis donc ressorti de l'Institut avec un diplôme de guitare classique. Je suis également détenteur, de l'Institut de musique de Sousse, d'un diplôme de musicologie. Je suis parti à l'étranger en 2002, notamment à Paris pour préparer un master. Je me suis inscrit durant la période 2009-2012, dans les conservatoires et universités de Paris et Lyon pour des formations de master et doctorant en arts, sanctionnées par des diplômes de chant, musique et musicologie. J'ai obtenu de nombreuses consécrations, notamment le Prix public au concours international Open Opera 2015 à Livourne et le 1er prix du concours international O.M.E.G.A (Orchestra Musica Europea Gruppi Association) ainsi que le prix public au concours international de Canari (Corse, France). J'ai pris part à de nombreux concerts d'opéra lors des festivals tenus en France et en Italie où j'ai campé ténor de nombreux rôles dans des œuvres universelles telles Rigoletto de G. Verdi, ou le rôle de Nadir dans Ali Baba de Luigi Cheruibini. C'est la première fois que vous vous produisez sur une scène algérienne ? Effectivement, c'est la première fois que je viens en Algérie. J'en suis ravi et honoré à la fois. Je trouve que le Festival international de la musique symphonique d'Alger est un excellent festival. Le niveau est bon. Les musiciens algériens sont talentueux. Sans prétention aucune, l'orchestre symphonique tunisien est lui aussi de haute facture. Je pense sérieusement que nous pouvons monter un orchestre de musique symphonique en coproduction. Si jamais j'arrive à motiver quelques producteurs ou quelques productions qui peuvent passer en coopération avec l'Algérie et la Tunisie, pourquoi pas. Au moins nous aurons un noyau. Je sais que l'orchestre symphonique algérien est utilisable. Il a l'habitude des scènes. Nous pouvons compter sur lui sur place. On a quelque chose déjà de résolu. Car déplacer un orchestre européen cela coûte une fortune et c'est compliqué. L'idée, c'est d'utiliser ce qu'il y a sur place et de faire motiver les deux. C'est-à-dire une coproduction avec des musiciens algériens et tunisiens. Il faut une volonté. Il faut attirer les sponsors. Il faut motiver les dirigeants. Il faut arracher aussi le budget. Il y a un travail à faire pour 2017 et 2018. Vous n'activez pas sur la scène artistique tunisienne, mais vous suivez l'actualité de loin... Il est vrai que je ne suis plus retourné en Tunisie pendant une période assez longue. Mai là j'y vais de temps à autre pour voir la famille. Je suis toujours en contact avec la Tunisie, mais je ne suis plus sur le terrain. J'écoute les choses de loin. Il y a des amis qui me rapportent des choses. Justement comment se porte la musique symphonique en Tunisie ? Je pense que la musique symphonique tunisienne galère pour progresser, et ce, pour plusieurs raisons. Je pense que la culture n'est pas une priorité dans mon pays. Si l'on regarde la situation politique de mon pays, le culturel n'est pas la priorité du peuple en ce moment. Il y a des problémes beaucoup plus importants à régler que la musique. Quand quelqu'un vient et fait des conneries en s'explosant, cela touche tout le monde, notamment ceux qui font de la musique. En dépit de cet état de fait, il existe beaucoup de personnes qui continuent à s'exprimer à travers la musique. Il y a des compétences et de l'endurance. Il y a aussi le vouloir de faire les choses dans les règles de l'art. Aujourd'hui, le contexte est démotivant. Si je peux jouer un rôle, aujourd'hui, pour faire un pont avec les pays qui ont la tradition, pourquoi pas. Vous êtes un ténor très sollicité à travers le monde. Que retenez-vous de tous ces échanges culturels ? Je dois préciser que je ne suis pas professeur, car si je l'étais, je ne pourrais pas faire ce que je fais là actuellement. Je suis chanteur ténor soliste. Je travaille un peu avec tout le monde. J'ai un calendrier sur l'année avec des séries de concerts et des choses qui arrivent au dernier moment. Il y a aussi des auditions pour des rôles. Il y a des auditions qui sont prévues une année ou deux années à l'avance. Tout dépend de l'importance des événements. Je dirais que toutes ces expériences bénéfiques, à plus d'un titre, m'ont permis de me forger au fil du temps. Avez-vous été sollicité pour les besoins du cinéma ? Je n'ai eu aucune proposition de ce genre. Disons à l'époque, avec le réalisateur tunisien Nouri Bouzid, j'ai participé en tant que musicien guitariste. Je n'ai pas de chant lyrique pour le cinéma. Le Monde arabe détient-il beaucoup de voix en chant lyrique ? Le Monde arabe détient beaucoup de stars dans le chant lyrique. A titre d'exemple, nous avons Djelloul, qui a chanté dans les grandes scènes françaises. Le niveau est bon. On peut même avoir plusieurs niveaux, même chez les artistes stars. Par ailleurs, je dirais qu'il y a des artistes partout, mais le niveau n'est pas à la hauteur de la star. Cela peut exister aussi. Tous les ténors n'étaient pas à la hauteur de Pavarotti. Pavarotti était un excellent ténor. Justement que préconisez-vous aux jeunes qui voudraient se lancer dans ce genre de chant ? Je conseille à ces éventuels jeunes d'être avant tout autodidactes. Je ne crois pas qu'il existe des professeurs spécialisés dans le chant lyrique. Le professeur n'est pas là pour apprendre le chant au chanteur. Le chanteur doit apprendre par lui-même. C'est un autodidacte avec l'aide d'une écoute extérieure. On fait confiance à un prof pour nous aider et aiguiller.