Amirouche Malek, qui fait ses premiers pas dans le cinéma, s'est intéressé, avec beaucoup d'émerveillement, à la pédagogue et femme de lettres Djoher Amhis Ouksel, dans un documentaire biographique réalisé par Amrouche Mehmel et présenté dimanche soir, en avant-première, à la Cinémathèque d'Alger. Djoher Amhis, une femme d'exception retrace le parcours professionnel, intellectuel et militant d'une femme qui, au fil des ans, s'est spécialisée dans la relecture des œuvres littéraires algériennes. Elle a notamment écrit Taassast sur le roman La Colline oubliée de Mouloud Mammeri, Dar Sbitar sur le livre La Grande maison, de Mohammed Dib et Le prix de l'honneur sur l'œuvre de Malek Ouary La graine dans la meule. Elle a également écrit des textes sur les œuvres de Abdelhamid Benhadouga, Tahar Djaout et Taous Amrouche. «Ses ouvrages de quelques dizaines de pages, faciles à lire, simplifient la compréhension des œuvres aux jeunes», est-il relevé dans le documentaire écrit par Lila Aït Larbi. Djoher Amhis Ouksel s'est rendu compte que la nouvelle génération ne connaissait pas les œuvres des grands auteurs algériens. «Les jeunes veulent apprendre. Il faut leur redonner confiance et les respecter», conseille-t-elle devant la caméra de Amirouche Malek. Elle a regretté que les romans de Mouloud Mammeri et de Kateb Yacine soient «effacés» de l'enseignement par la dictature de Houari Boumediène. Dans Le chant de la sitelle, elle a fait son autobiographie (un livre couronné par le prix de la Fondation Mahfoud Boucebsi). Professeur au lycée de Médéa, puis à Alger, diplômée en licence de lettres modernes à l'université d'Alger, inspectrice de l'enseignement et enfin formatrice à l'Institut technique de l'enseignement (ITE) de Ben Aknoun, Djoher Amhis Ouksel a eu un parcours dense dans le secteur de l'éducation, «déterminée à porter la voix des femmes», comme il est souligné dans le documentaire. «Au pays des hommes libres, les femmes sont reines», souligne Djoher Amhis Ouksel. Pour elles, les femmes algériennes ont souffert en silence, «enfermées dans l'école de la société patriarcale». Depuis sa retraite en 1983, elle s'est consacrée à l'écriture et à l'animation de conférences sur la littérature et sur la pédagogie. «Elle répond présente là où la voie de la culture l'emmène. Ecrire est une manière de poursuivre l'éducation, sous une autre forme», est-il noté. Malika Hachid, Ali Feraoun, Sadia Barèche, Mouloud Achour, Adriana Lassel, Youssef Merahi et Denis Brahimi ont tous témoigné dans le film de Amirouche Malek sur l'engagement littéraire et intellectuel de Djoher Amhis Ouksel et sur son souci de transmettre ses connaissances aux jeunes. «J'aime recevoir les amis, partager un repas. J'aime ouvrir ma maison à la joie», confie Djoher Amhis Ouksel. Plus proche du reportage que du documentaire, Djoher Amhis, une femme d'exception souffre quelque peu des répétitions dans la narration, de l'utilisation de la même musique du début jusqu'à la fin et d'un manque d'appuis en archives filmées sur le parcours de la femme de lettres. L'attachement de Djoher Amhis Ouksel à la relecture des textes littéraires algériens n'est pas suffisamment exploré, autant que le regard qu'elle porte sur l'univers de l'écriture en Algérie. Amirouche Malek a voulu limiter son travail à 52 minutes, alors qu'il aurait pu aller au-delà en approfondissant sa recherche sur son personnage central et en donnant plus d'espaces aux témoignages de ceux qui l'ont côtoyée et connue.