Le pacte économique et social suscite des critiques. Adopté le 30 septembre dernier, lors de la 12e tripartite, par le gouvernement, le patronat et l'UGTA, ce pacte, pour lequel un membre du CNES a relevé des « imprécisions » sur les volets social et croissance, samedi dernier, fait l'objet de plusieurs objections de la part du directeur général de l'Institut de développement des ressources humaines, Mohamed Bahloul. Celui-ci, contacté hier par téléphone, fait d'emblée deux observations en réaction au contenu de ce pacte. Première remarque, M. Bahloul note le problème que pose la démarche de la préparation de ce pacte économique et social. Pour lui, ce pacte devait être « un document technique important » pas uniquement basé sur le social. Autre bévue, selon notre interlocuteur, est que ce pacte « s'apparente à un outil de répartition » de la rente. Cet éminent économiste regrette en fait que ce pacte ait été « élaboré dans une optique de distribution du surplus que pour la formation d'une économie productive ». Or, aux yeux de M. Bahloul, « les partenaires, le gouvernement, le patronat et les travailleurs devraient négocier les termes d'un modèle de compétitivité par le coût si l'on veut faire face aux défis de la concurrence internationale, notamment celle des pays asiatiques, telle la Chine, et surtout contribuer à arrêter le déclin de l'industrie algérienne ». M. Bahloul insiste encore à dire que dans ce pacte « on est dans une approche distributive plutôt que dans une approche de fondation d'une économie productive ». Pour lui, l'Algérie accuse un retard important dans le fondement d'une économie de production. « C'est une croissance issue du travail qu'il faut et pas celle issue de la rente », selon M. Bahloul, qui suggère qu'on ouvre un débat pour un nouveau pacte. Dans le même cadre, M. Bahloul pose également le problème du financement du pacte. Sur un autre front, Mohamed Bahloul a beaucoup insisté, sur les ondes de la Chaîne III de la Radio nationale, sur le volet formation de la ressource humaine. « Il faudrait comprendre que la revalorisation de la ressource humaine ne devrait pas uniquement tourner sur le volet salarial », a-t-il dit, estimant que « la ressource humaine se pose comme objectif fondamental dans la mise à niveau des entreprises ». M. Bahloul pose quatre problématiques en ce qui concerne la mise à niveau des entreprises : le management, le coût de la production, la ressource humaine et l'intégration dans le système international du marché. « Valoriser la ressource humaine, c'est savoir faire une entreprise et savoir faire des calculs économiques », selon lui. M. Bahloul estimera par ailleurs qu'il y a un déficit important en termes de qualification de la ressource humaine dans nos industries. Selon lui, dans nos industries, 30% des travailleurs sont analphabètes, 15% ont un niveau primaire, 50% ont un niveau secondaire et seulement 5% ont un niveau universitaire. M. Bahloul estime que le problème de la ressource humaine est une contrainte structurelle importante pour les projets et les grands programmes de développement. Notre interlocuteur suggère par ailleurs, pour éviter la fuite des valeureux cadres et diplômés, de créer un modèle institutionnel qui mettra en confiance les élites et améliorera la qualité de vie. Il s'est dit contre les grilles des salaires unifiés. « L'uniformisation dans une économie de marché est antiéconomique », selon M. Bahloul. « Dans la politique des salaires, la partie économique doit obéir au marché du travail », a-t-il expliqué. « C'est dommage qu'on ait raté l'occasion de mettre en place un nouveau système économique national », conclut-il.