Détenu auparavant par le groupe ArcelorMittal à hauteur de 49% pour ArcelorMittal Algérie (AMA) et ArcelorMittal Tébessa (AMT), et de 70% pour ArcelorMittal Pipes&Tubes Algérie (AMPTA), la totalité du capital de ces trois entreprises est, depuis hier, dans le giron du groupe public algérien Industries métallurgiques et sidérurgiques (IMETAL). Le ministre de l'Industrie et des mines, Abdesselam Bouchouareb a relevé, en marge de cette cérémonie que « ces entreprises sont aujourd'hui totalement nationales » tout en soutenant que cet accord vise « la promotion de l'autosuffisance du pays en acier ». Mais à quel prix ?. En effet, l'accord signé officiellement, hier, entre les deux parties au niveau du ministère de tutelle ne fait qu'entériner les dix résolutions du conseil de participation économique, validées le 25 juillet dernier. Selon le document portant la résolution du CPE, dont El Watan détient une copie, le conseil a décidé dans sa 7ème résolution « d'accompagner les sociétés reprises -AMA, AMT et AMPTA- en attendant la présentation de leurs plans de redressement et de développement actualisés, par des facilités de caisse pour assurer l'exploitation durant les six mois à venir moyennant présentation des plans de trésorerie de chacune des entités pour cette période à la banque domiciliataire BEA et charge à cet effet, cette dernière de la mise en œuvre de cette décision dans les meilleurs délais ». Jusqu'à hier, le haut fourneau est à l'arrêt et le complexe n'a rien produit. Pis encore, la direction générale arrive difficilement à assurer la masse salariale des travailleurs, estimée à 500 millions de dinars. Au début du mois de juillet, des cadres de l'entreprise ont prévenu qu'«En septembre prochain, les sidérurgistes n'auront plus leurs salaires et le complexe sera inévitablement en cessation de paiement. Et puisque les 355 millions de dollars déboursés par la BEA au titre de l'exploitation sont déjà consommés sans pour autant produire une seule barre de rond à béton, l'Etat a déboursé encore une fois 6 milliards de dinars qui viennent d'être aussi consommés». Un gouffre financier, creusé par les décisions irréfléchies du ministre de l'industrie et soutenu, en plein crise économique, par le CPE qui vient encore une fois racler la trésorerie de l'état en ordonnant à la BEA d'assister financièrement le complexe d'El Hadjar jusqu'au début de 2017. Il a ignoré l'appel des cadres qui ont interpellé le Premier ministre pour diligenter une expertise légale qui sera assurée par l'Inspection générale des finances (IGF). «Elle portera sur l'utilisation des fonds publics à ArcelorMittal Algérie, ainsi que sur l'efficience et la légalité de la restructuration du secteur de l'industrie.» détaillent-ils. D'aucuns qualifient que le partenariat avec ArcelorMittal est un grand ratage et la passivité de responsables algériens est aussi claire et plus grave que le ratage lui-même. « Un partenariat de ce volume est construit pour une période moyenne de 50 ans, il est un peu cocasse qu'on y mette fin au bout de douze ans, sans aucune forme de procès. Il s'agit d'une résiliation anticipée d'un contrat dont on ne connait ni les raisons ni la nature. Une sorte de rupture sans inventaire et sans reddition de compte » estime Me Lezzar Nasreddine, avocat d'affaires. Force est de relever que depuis sa création, le groupe Imetal qui vient d'acquérir les actions des filiales d'ArcelorMittal en Algérie a toujours été géré par des cadres dont la compétence relève exclusivement du bâtiment. A commencer par Boudjema Talaï, avant qu'il n'accède au poste de ministre des Transports et celui des Travaux publics. Sa promotion a permis à Kamel Djoudi de le remplacer. Parti pour engagements non tenus, ce dernier sera remplacé par Ahmed Yazid Touati, encore un autre retraité du bâtiment. Paradoxalement, ces trois PDG du groupe Imetal sont issus de Batimetal avec une méconnaissance flagrante du monde de la sidérurgie. «C'est le ‘‘principe de Peter'' qui est adopté dans notre secteur où, dans une hiérarchie, tout responsable a tendance à s'élever à son niveau d'incompétence», tonnent les mêmes cadres. Pour preuve, étayent-ils, depuis le 7 octobre 2015, l'usine n'a réalisé aucune production, encore moins commercialisé un quelconque produit. Annoncée en grande pompe, la récupération des actifs d'ArcelorMittal en Algérie, transférés au groupe public Imetal, s'est avéré un échec cuisant bien qu'un plan d'investissement de près d'un milliard de dollars ait accompagné cette décision. Après le complexe d'El Hadjar, le groupe Imétal a d'autres dossiers qui trainent toujours. Il en est ainsi de sa réorganisation qui, depuis sa création en février 2015, n'a pas été juridiquement, concrétisée jusqu'à ce jour. « Finalisée fin décembre 2015, la restructuration du secteur de la sidérurgie et de la métallurgie n'a pas respecté les dispositions prévues par l'article 744 et suite… du code du commerce, de même que la résolution du CPE relative aux opérations de transfert, de fusion-absorption…etc. Le groupe Imétal déclare la fin de l'existence de ses entreprises au 31 décembre 2015 et procède au transfert de ses filiales en violation flagrante des lois de la République. Une cessation d'existence d'une société doit être suivie simultanément par la création d'une autre entité juridiquement viable dans le souci d'encadrer le patrimoine et le personnel existants. Dissoutes, ces unités activent actuellement de fait et non de droit», dénonce un commissaire aux comptes invalidant la modification à plusieurs reprises des PV d'assemblées générales extraordinaires (AGEx).