Pour le moment, ni l'Union africaine et encore moins les pays occidentaux n'ont reconnu les résultats de l'élection présidentielle au Gabon. Bien au contraire, le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon, à l'instar de quelques pays, a appelé à une «vérification transparente» des résultats et critiqué «la réponse disproportionnée des agences de sécurité» aux violences. Trois jours après les heurts entre forces de l'ordre et manifestants opposés à la réélection de Ali Bongo Ondimba, la situation prête toujours à inquiétudes au Gabon. En témoigne la façade de l'Assemblée nationale partiellement incendiée dans la nuit de mercredi à jeudi, l'embrasement a surtout touché la capitale Libreville. Dans la nuit de jeudi à vendredi, des troubles ont éclaté de nouveau dans un quartier de la capitale gabonaise et fait deux morts. Ces deux décès portent à cinq le nombre de victimes recensées depuis le début des troubles mercredi après-midi, juste après l'annonce des résultats de la présidentielle. Le ministre gabonais de l'Intérieur a indiqué en outre qu'entre 800 et 1100 personnes ont été interpellées dans l'ensemble du pays. Par ailleurs, 27 personnes sont toujours empêchées de sortir du QG de Jean Ping (48,23% des voix, selon la commission électorale), suite à l'assaut mené par les forces de l'ordre. Les 27 personnes, toujours retenues par la gendarmerie gabonaise au siège de campagne, ont interpellé directement Barack Obama, François Hollande, Ban Ki-moon et la chef de la diplomatie européenne, Federica Mogherini. Ils leur demandent «une réaction ferme permettant de mettre fin à leur séquestration arbitraire». Le texte dénonce aussi les conditions de leur détention au sein du QG de Jean Ping. Pour le moment, ni l'Union africaine et encore moins les pays occidentaux n'ont reconnu les résultats de l'élection présidentielle. Bien au contraire, le secrétaire général des Nations unies, Ban Ki-moon, à l'instar de quelques pays, a appelé à une «vérification transparente» des résultats et critiqué «la réponse disproportionnée des agences de sécurité» aux violences. Les critiques de l'ONU M. Ban a aussi demandé au gouvernement gabonais de «rétablir immédiatement» les moyens de communication (internet, SMS, radios et télévisions indépendantes) et aux forces de sécurité de respecter les droits de l'homme et de faire preuve de «la plus grande retenue». Le président français François Hollande — dont le pays entretient une grande proximité avec le Gabon où il possède une base militaire et de gros intérêts économiques — a appelé aussi jeudi toutes les parties à la retenue et à l'apaisement. Il a, par ailleurs, «condamné avec la plus grande fermeté les violences et les pillages, ainsi que les menaces et les attaques portées contre les partisans des principaux candidats». Une manière sans doute de dénoncer la prise d'assaut du QG de Jean Ping par les forces de sécurité et l'arrestation de plusieurs leaders de l'opposition. «Pour que la situation s'apaise, François Hollande demande la transparence sur les résultats du scrutin, car il y a un doute sur leur sincérité», a estimé jeudi le ministre des Affaires étrangères, Jean-Marc Ayrault. En cause notamment les résultats dans le Haut-Ogooué, fief familial de Ali Bongo, où ce dernier aurait obtenu plus de 95% des voix pour plus de 99% de participation. Vérification des résultats Ces chiffres sont considérés comme peu crédibles par la classe politique française qui a, dès le début, marqué sa préférence pour le candidat Jean Ping. C'est le cas particulièrement du Parti socialiste (PS). Ce même parti et certaines figures de l'opposition parmi lesquelles Alain Juppé, candidat à la primaire de la droite, ont carrément appelé à un recomptage des voix et à la publication des résultats bureau par bureau, chose que le gouvernement gabonais dit refuser. C'est jeudi que le président gabonais, Ali Bongo, a affiché sa fermeté, rejetant la responsabilité des violences sur des «groupuscules formés à la destruction». «La démocratie s'accorde mal des succès autoproclamés, des groupuscules formés à la destruction. La démocratie s'accommode mal de la prise d'assaut d'un Parlement et de la télévision nationale», a-t-il déclaré lors d'une brève allocution, ajoutant que «toutes les décisions censées garantir la sécurité dans le pays seront prises». «Les élections ont rendu leur verdict (...). Qui a perdu ? Un groupuscule dont le seul projet était de prendre le pouvoir pour se servir du Gabon et non servir le Gabon», a encore accusé le fils et successeur de Omar Bongo, en visant Jean Ping, son principal rival à la présidentielle, qui était parvenu à rallier d'autres candidats importants de l'opposition. En attendant que la crise connaisse son épilogue, certaines villes subissent un début de pénuries. Li-breville et les autres grandes villes du pays sont surtout menacées par la pénurie de pain et de produits frais, les transports étant paralysés. La situation est aggravée par les pillages massifs de commerces et les barricades érigées un peu partout. Dans certaines villes frontalières, des postes de contrôle de gendarmerie sont même tenus par les habitants qui attendent que Jean Ping prenne la parole et un nouveau décompte des voix. Désormais le bras de fer oppose la rue gabonaise et Ali Bango.