La loi de finances 2017 propose un cadrage macroéconomique du budget, affichant ainsi, pour la première fois, une vision qui dépasse le très court terme. Assurément, par cette codification macroéconomique des agrégats financiers et monétaires, l'Exécutif cherche à améliorer la gestion des dépenses et, par la même, à répartir dans le temps les efforts d'ajustement budgétaire. Il est ainsi proposé une réforme budgétaire étalée sur trois années, couvrant la période 2017-2019, lit-on dans le texte du projet de loi de finances 2017, dont nous avons pu avoir une copie. C'est aussi pour lutter contre les effets pervers du choc externe et les perspectives de détérioration des indicateurs macroéconomiques que le gouvernement a décidé d'explorer la piste du réajustement étalé sur trois années. Longtemps obnubilé par le très court terme à calculer la vitesse de fonte des réserves, et à tenter des réponses peu ou prou efficientes, le gouvernement a pris la décision de répartir, dès le prochain exercice, le poids de l'ajustement. Il sera question d'éliminer en cours de chemin certaines irrégularités constatées dans l'affectation des ressources et en faisant apparaître au final une tendance générale de la trajectoire budgétaire. Du fait de l'avenir incertain du marché pétrolier, l'Etat a décidé ainsi de plafonner les dépenses publiques pendant les trois prochaines années. Les coupes dans les dépenses d'équipement (16% en 2016 et 28% en 2017) visent à maintenir un plafond soutenable et à ne plus ériger l'investissement public en unique moteur de croissance. Dans le projet de loi de finances 2017, il est clairement dit qu'un renforcement de l'investissement privé dans des secteurs à très haute valeur ajoutée serait une conduite vertueuse pour la diversification de la croissance. Cependant, certains économistes, dont Raouf Boucekkine et Nour Meddahi, avertissent quant à une conséquence sociale pesante que pourrait provoquer une baisse drastique des dépenses d'équipement. Mesure des risques C'est-à-dire qu'à trop vouloir réduire le déficit par une coupe importante dans les dépenses d'équipement, étalée sur plusieurs années, l'Exécutif risque de compromettre les projets de sortie de crise, d'autant plus que l'investissement privé n'est pas prêt pour prendre le relais à très court terme. Face à l'impératif de réduire la voilure dans les dépenses d'équipement pour faire face aux déficits, le gouvernement fait le choix de libérer l'investissement privé, en s'y intéressant de plus près. D'abord par le moyen d'une nouvelle loi encadrant l'investissement, suivi de certaines propositions contenues dans le projet de loi de finances 2017, voté récemment en Conseil des ministres. Reste à régler le problème de dépendance de tout un pan de l'investissement privé de la commande publique. Cette nouvelle orthodoxie budgétaire étalée sur les trois prochaines années repose également sur le principe de renoncement graduel aux subventions implicites et superflues. Dans ce contexte budgétaire tendu, qui s'est traduit par une baisse d'environ 40% de la valeur des exportations, l'Etat a fait le choix, dès 2016, de lever le pied sur certaines subventions. Après la hausse des prix des carburants et de l'électricité en 2016, la loi de finances 2017 propose le relèvement de la taxe imposable aux produits pétroliers, libéralisant ainsi à nouveau les prix des carburants. La loi de finances 2017 tente de faire sauter aussi le tabou des subventions aux entreprises en modifiant la politique fiscale de l'Etat. Désormais, tout le monde ne sera pas logé à la même enseigne en matière de fiscalité ; taxation des produits énergivores, des produits de luxe et des produits importés, etc. Sous la pression de la baisse brutale des prix pétroliers — qui s'est traduite par le creusement du déficit budgétaire (près de 30 milliards de dollars à fin 2016), l'effondrement de la valeur des exportations, une baisse significative des réserves de change et épuisement des ressources du FRR —, le gouvernement semble vouloir enfin renoncer aux visions de très court terme, en s'investissant dans certaines réformes structurelles, bien que certaines ne soient pas sans conséquences.