Tenue jeudi dernier, la dernière session ordinaire du Conseil supérieur de la magistrature (CSM) est pour le secrétaire général du Syndicat national des magistrats (SNM), Djamel Aidouni, «tout à fait ordinaire. Il s'agit d'un mouvement dans les rangs des magistrats qui, comparativement aux précédentes restructurations, n'est pas aussi important. Il y a eu régularisation de situations et de nouvelles nominations d'une trentaine de chefs de cour aux postes créés récemment à la faveur de l'ouverture de nouvelles juridictions.» Ainsi, si pour le premier responsable du syndicat des magistrats la dernière session du CSM «est tout à fait ordinaire» et que les recours acceptés par cette haute instance répondent «à la nécessité de rapprochements familiaux» (des couples de magistrats), pour des membres de cette corporation, celle-ci appelle à des remarques pertinentes. «Ce mouvement aurait pu être qualifié de normal, n'étaient quelques mesures surprenantes. D'abord, la rétrogradation dans les postes de trois chefs de cour. Le président de la cour de Bordj Bou Arréridj se retrouve conseiller à la cour de Naâma, le procureur général de Tamanrasset a été nommé procureur général adjoint de Mascara, alors que le président de la cour de Naâma dégringole pour être muté en tant que conseiller à la cour de Saïda. Cela s'appelle une rétrogradation qui, en vertu du statut de la magistrature, s'apparente à une sanction de 2e degré. Une telle mesure ne peut être prise en dehors d'une session disciplinaire du CSM. Comment expliquer que de telles décisions peuvent être prises lors d'une réunion ordinaire du CSM ?» souligne un magistrat. Certains de ses collègues reviennent plutôt sur cette nomination à la Cour suprême et au Conseil d'Etat d'une trentaine de chefs de cour auxquels le chef de l'Etat a mis fin à leurs postes. «C'est vrai que ces postes relèvent des prérogatives du président de la République. Néanmoins, il faut noter que même s'ils gardent leurs salaires, il n'en demeure pas moins qu'ils restent tous sans poste, en attente d'un décret pour leur désignation à la Cour suprême. Le cas de Belkacem Zeghmati, ancien procureur général près la cour d'Alger, est révélateur. Il est resté 14 mois sans poste. Sa nomination en tant procureur général adjoint près la Cour suprême n'est que justice. Il faut aller vers un mécanisme qui permette la désignation automatique des chefs de cour à leur nouvelle mission dès que le Président met fin à leurs fonctions», notent nos sources. Elles précisent : «Maintenir un juge dans une situation d'attente, d'incertitude, sans aucune perspective d'avenir, est la pire des pressions que l'ont peut exercer sur lui. Plus grave encore, c'est une manière de porter atteinte à son indépendance. Ne sommes-nous pas dans une situation d'illégalité ? La question revient avec insistance.» Nos interlocuteurs reconnaissent cependant que pour la première fois dans l'histoire du CSM, cette haute instance qui régit la carrière des magistrats répond favorablement aux recours de ces derniers. «Il y a eu près de 300 recours introduits par des juges touchés par les mouvements opérés en 2015 et 2016. Le Conseil a répondu favorablement à 68 d'entre eux. Ce qui est très appréciable. Habituellement, tous les recours sont rejetés. Visiblement, la décision est importante et mérite d'être soulignée.»