L'Algérie risque-t-elle de connaître une période de sécheresse semblable à celle de la saison 1996-1997, durant laquelle la population avait souffert pour s'approvisionner en eau potable ? La question est de plus en plus posée, surtout par les agriculteurs qui redoutent que la saison soit à moyen terme compromise. Si la pluie n'est pas de retour, il faut s'attendre à vivre une situation désastreuse. La facture alimentaire, déjà faramineuse (environs 2 milliards de dollars), risque aussi d'être plus lourde et le citoyen sentira la différence en faisant son marché. Il a déjà eu un aperçu avec la flambée des prix de la pomme de terre qui continue à être vendue entre 50 et 60 DA le kilo. Contacté hier, Amar Assabah, directeur de la régulation et du développement de la production agricole au niveau du ministère de l'Agriculture et du Développement rural, nous a affirmé : « Il y a effectivement un manque de pluies, mais il n'y a rien d'irréversible. Si la pluie tombe les prochains jours, la situation deviendra normale. C'est la période des semis pour les grandes cultures, la pluie manque, mais il n'y a rien de compromis ». Malgré cela, il préfère le terme « insuffisance pluviométrique » à « sécheresse ». Si l'Algérie n'a pas franchi la ligne rouge, il faut toutefois « s'inquiéter », dira-t-il, car « si d'ici la fin novembre, il n'y a pas de pluie, il pourrait y avoir un retard et affecter la récolte. Cette situation touche en particulier les cultures pluviales et non maraîchères ». D'un autre côté, le ministère des Affaires religieuses a réagi à cette situation préoccupante en appelant les imams à effectuer, hier, la prière de l'istisqaa (rogation pour la pluie) dans toutes les mosquées du pays. La disponibilité de l'eau reste un casse-tête et une préoccupation majeure des pouvoirs publics. Une politique globale est à définir, selon les experts, car on ne peut continuellement s'en remettre à la clémence du ciel. L'absence de pluies fait craindre des conséquences néfastes pour la saison agricole alors que l'automne est déjà avancé. La sécheresse sévit dans la majorité des wilayas et elle frappe aux portes des autres régions. Abdelmalek Sellal, ministre des Ressources en eau, s'est voulu rassurant en s'exprimant récemment lors d'un débat sur la Chaîne III écartant « toute perturbation ou interruption dans la distribution d'eau potable en conséquence du manque de précipitations pluviales qui hante tous les esprits ces dernières semaines ». La crainte d'une mauvaise surprise plane toujours à l'horizon. L'enveloppe globale de l'investissement pour les projets du secteur de l'eau en Algérie est estimée à 12 milliards de dollars pour 2005-2010. Les ressources en eaux mobilisables de nos jours sont estimées à 6,3 milliards de m3 par an qui se répartissent ainsi : 2,8 milliards de m3/an par les 57 barrages en exploitation pour une capacité de stockage de 5,7 milliards de m3, 1,8 milliard de m3/an à partir des eaux souterraines dans les régions du Nord et 1,7 milliard de m3/an à partir des eaux souterraines dans les régions sahariennes. A une question sur la sécheresse que connaît le pays et ses répercussions sur l'alimentation en eau potable, le premier responsable du secteur a précisé en répondant, jeudi dernier, aux questions orales, adressées par les membres de l'APN, que « seules les régions ouest du pays en sont actuellement affectées, alors que le reste des régions en est épargné grâce à un taux de remplissage des barrages (44%) satisfaisant ». L'accès à l'eau risque de devenir encore plus problématique en raison des changements climatiques, selon une étude du Programme des Nations unies pour le développement (PNUD). En particulier, la combinaison de températures en hausse et de précipitations en baisse entraîne de « plus longues périodes de sécheresse ».