L'article «Quand les hors-la- loi font la loi», publié dans notre édition du 23 janvier 2017, a suscité la réaction du ministère de la Jeunesse et des Sports (MJS) sous la forme d'un droit de réponse publié intégralement le 26 janvier 2017. Pour rappel, l'article en question avait pour objet l'assemblée générale élective de la Ligue interrégions (LIRF), tenue le 21 janvier. Le silence qu'il a observé sur les multiples dépassements et violations de la loi et règlements par la fédération algérienne de football (FAF) et la Ligue interrégions (LIRF) à l'occasion de l'opération de renouvellement des instances de la LIRF, trouve sa justification dans le fait que le département du ministre El Hadi Ould Ali partage la conviction de la FAF et de la LIRF sur la légalité de l'opération des élections qui se serait déroulée, à en croire le droit de réponse du MJS, dans le respect des textes règlementaires en vigueur. C'est ce qui ressort des précisions du MJS. Le MJS, qui a la charge de veiller au respect des lois de la République algérienne, a failli dans sa mission sur toute la ligne. Il a cautionné la transgression, par la FAF et la LIRF, des lois et règlements régissant l'opération électorale. Les multiples violations de la loi et règlements se déclinent ainsi : Composition de l'assemblée générale de la LIRF L'article 5 du statut type de la LIRF, en vigueur et souligné dans la réponse du MJS, découlant du décret 14.330 du 25 novembre 2014, a expressément déterminé la composition des membres de l'AG, sans pour autant inclure les experts, tout en précisant que cette composante est fixée et modulée dans les statuts en fonction des spécificités et des exigences requises pour chaque fédération, et ce, après accord du MJS. Cette disposition de modulation ne confère en aucune manière le droit à la FAF d'apporter des modifications touchant au fondement même du texte règlementaire, en ce sens que les statuts élaborés par la FAF ne peuvent intégrer que des compétences liées au football (spécificité) pour apporter leur contribution à titre consultatif lors des travaux de l'assemblée générale. L'intégration des experts dans les statuts est une violation de la loi. Avant de les adopter, le MJS se devait d'exiger de la FAF de bien définir la qualité d'expert. Le principe d'intégration des experts ne peut être retenu s'il vient en contradiction avec les dispositions des lois et règlements fondamentaux. Les experts ne satisfont pas à la condition exigée pour bénéficier de la qualité de membre de l'assemblée générale d'une ligue tel que prévu par l'article 5 du statut type qui précise : «Chaque représentant élu prévu au présent article doit avoir exercé au moins une année au sein du club sportif ou de la ligue respectifs…». L'expert désigné par la FAF n'étant même pas élu, il ne peut prétendre à une fonction exécutive. Et encore plus pour pouvoir prétendre à la fonction de président de la ligue comme stipulé par l'article 38 du statut de la ligue (titre, des conditions d'éligibilité). «Les candidats aux fonctions de président ou membres de bureau de Ligue interrégions de football doivent répondre aux conditions d'éligibilité ci-après : être membre de l'assemblée générale…». Plus grave. Les statuts de la LIRF confèrent le droit exclusif aux experts intrus de prétendre à la fonction de président tout en excluant les membres de l'AG de la course à ce poste. Cela constitue une violation caractérisée des lois et règlements (loi 13.05 du 23.07.2013 et décret 14.330 du 25.11.2014 qui consacrent le principe démocratique lorsqu'il s'agit des élections, une règle fondamentale que le MJS a totalement ignorée en adoptant une attitude complaisante à l'égard de la FAF. Article 26 : «Le président de la LIRF est élu parmi les indépendants au scrutin direct et secret et à la majorité simple des voix des membres de l'AG», alors qu'un autre article du même statut définit la notion d'indépendants. Article 17 : «Au sens des présents statuts sont considérés comme membres indépendants : 1- les experts de la FAF. 2- les anciens présidents de ligue». L'intégration des experts dans les statuts sous prétexte des spécificités du football est en flagrante contradiction avec la loi de juillet 2013 les statuts de la FIFA. Article 14 des statuts de la FIFA : Obligations des associations membres «Les associations membres ont les obligations suivantes : ratifier des statuts conformes aux exigences des statuts standards de la FIFA». Les statuts de la FIFA ne prévoient pas d'experts en qualité de membre de l'AG. Pire, le droit et privilège accordés aux experts de la FAF relèvent de la discrimination interdite par la loi fondamentale n° 12-06 du 12-01-2012, relative aux associations (la FAF étant une association régie par cette loi) et les statuts de la FIFA. Ainsi, l'article 28 de la loi 12-06 du 12-01-2012 stipule que «les statuts des associations ne doivent pas inclure des clauses ou des procédures discriminatoires qui portent atteinte aux libertés fondamentales de leurs membres…», alors que l'article 15 de la même loi énonce : «les instances exécutives des associations sont élues et renouvelées selon des principes démocratiques». Par ailleurs, l'article 4 des statuts de la FIFA (non-discrimination) indique que «toute discrimination d'un pays, d'un individu ou d'un groupe de personnes pour toute raison est expressément interdite sous peine de suspension ou d'exclusion (de la FIFA)». L'article 15 des mêmes statuts (statuts des associations membres) stipule que «les statuts des associations membres de la FIFA doivent observer les principes de bonne gouvernance et en particulier… interdire toute forme de discrimination…». «Les statuts des associations membres doivent prévoir une procédure démocratique leur assurant une indépendance totale lorsqu'elles procèdent aux élections…», indique l'article 19 des statuts. Il apparaît clairement que la FAF avec la complicité du MJS s'inscrit en porte-à-faux avec la règlementation notamment dans l'élaboration des statuts de la ligue. Cette démarche expose la FAF à des sanctions internes et externes (FIFA) dans le cas où l'instance internationale venait à être saisie par un membre de l'AG de la LIRF et de toute autre ligue (wilaya-régionale). A cet effet, il y a lieu de citer les sanctions qu'encourt une entité qui enfreint la réglementation. Au plan interne, l'article 40 de la loi 12-06 du 12-01-2012 stipule que «la violation par l'association des articles 15 et 28 de la présente loi entraîne la suspension de son activité pour une période qui ne peut excéder six (06) mois…», alors qu'au plan international, il est dit dans l'article 19/2 des statuts de la FIFA que «la FIFA ne reconnaît pas les organes d'une association membre n'ayant pas été élus conformément aux dispositions de l'alinéa 2 précité», c'est-à-dire loin de toute influence. Candidat Unique Il est fort étonnant de constater que le MJS, sans vision et lecture objectives des lois et règlements régissant la Fédération, confirme avec une banalité déconcertante qu'il n'existe aucun texte dans le dispositif règlementaire en vigueur interdisant la candidature unique. A contrario, existe-t-il un texte règlementaire consacrant la candidature unique ? Cette manière de faire est la résultante de l'exclusion injustifiée (pratique malsaine) des membres de l'AG du droit de prétendre à la fonction de président de la ligue. L'intégration des experts va à l'encontre des procédures démocratiques consacrées par la loi (algérienne) et les statuts de la FIFA. Le système antidémocratique imposé par la FAF et cautionné honteusement par le MJS doit être définitivement banni. En favorisant l'option d'une candidature unique (démarche partagée par le MJS), désignée par la FAF, cette dernière s'est rendue coupable de violation grave des statuts de la FIFA, notamment son article 17 qui stipule : «Le congrès peut exclure une association membre si… elle (fédération) est coupable de violation grave des statuts, règlements ou des décisions de la FIFA…». Dans le même sens, l'article 11 des statuts de la LIRF (droit des membres) indique que «les membres de l'AG disposent du droit de proposer des candidatures pour leur élection au sein de tous les organes de la ligue». Validité des statuts de la LIRF La LIRF a fonctionné durant le mandat 2012-2016 avec le statut élaboré sur la base de la loi 90-31 du 04-12-1990 à laquelle fait référence le MJS dans ses précisions adressées à El Watan. Ignore-t-il que cette loi fondamentale a été abrogée par la loi 12-06 du 12 janvier 2012, que les statuts de la LIRF n'ont pas été mis en conformité avec la nouvelle loi et règlements en vigueur depuis le 12-02-2015 ? Dès lors, le renouvellement des instances de la LIRF, ainsi que toutes les autres instances renouvelées en 2016 avec le même procédé, sont frappées de nullité, d'autant plus qu'il appartient à l'AG de la LIRF de se prononcer sur les nouveaux statuts (chose qui n'a pas été faite) avant leur adoption par le MJS, comme le prévoit l'article 6 du statut type découlant du décret 14-330 du 27-11-2014 fixant les modalités d'organisation et de fonctionnement des fédérations sportives nationales, ainsi que leur statut type. Pour tout ce qui précède, le MJS doit invalider toutes les assemblées générales des ligues car elles ne se sont pas conformées à la nouvelle loi. C'est la raison pour laquelle nous avions titré, le 23 janvier 2017, «quand les hors-la-loi font la loi»