La commune d'Aït Zikki, à l'extrême est de la wilaya de Tizi Ouzou, ne sort de l'oubli que lors des tempêtes de neige. Grâce au rétrochargeur que nous utilisons quotidiennement pour ouvrir les routes lors des tempêtes de neige, la commune n'est pas isolée. Si jamais l'engin tombe en panne, toute la région serait paralysée», estime Boualem Moussaoui, président de l'APC d'Aït Zikki, une commune sise à 70 km au sud-est de Tizi Ouzou, à la limite de la wilaya de Béjaïa. La région est sans doute parmi les plus belles de la wilaya, mais aussi celle où les conditions de vie sont les plus rudes, notamment en hiver. La commune culmine à plus de 1400 mètres d'altitude et la saison hivernale y est marquée par d'importantes chutes de neige. L'épaisseur de la poudreuse dépasse largement un mètre, rendant pénible la vie quotidienne de la population locale, privée des commodités nécessaires pour parer à ces conditions extrêmes. «C'est un décor ordinaire ici à Aït Zikki, mais malheureusement le citoyen est pénalisé, car le gaz n'arrive pas encore dans les maisons», dira le maire en regardant par la fenêtre de son bureau, au siège de l'APC, les flocons de neige qui commencent à tomber dru en cette matinée de mardi. A Aït Zikki, en effet, les citoyens ont encore recours au bois de chauffage et aux bonbonnes de gaz qu'un «camion parvient difficilement à acheminer ici à cause de la route difficile à pratiquer», soutient Boualem Moussaoui. Nombreux sont les habitants qui commencent à désespérer de cette situation. «A chaque recensement que nous effectuons, nous enregistrons une quarantaine de familles qui quittent la commune pour s'établir ailleurs, dans d'autres régions plus clémentes», se désole le maire. Ils sont d'ailleurs moins de 3800 à vivre actuellement dans les huit villages que compte la commune. «Si ce n'est pas toute la famille qui s'en va, les enfants le font sans hésiter, car ils sont conscients qu'ici il n'y a pas de perspectives», ajoute notre interlocuteur. Les possibilités de trouver un travail sont en effet très limitées à Aït Zikki, puisque hormis le commerce de quartier et le petit élevage, les jeunes sont voués au chômage. «L'Assemblée communale a bien essayé d'arracher un projet pour la réalisation d'une unité de production d'eau minérale au lieudit Marza. Nous avons les potentialités naturelles pour le faire, d'ailleurs la région se suffit en eau qui provient des sources naturelles. Ce projet, qui aurait pu créer plusieurs postes d'emploi, a buté contre une multitude de contraintes et n'a jamais pu voir le jour», soutient le président de l'APC. La commune demeure cependant convoitée pour «des projets d'exploitation de carrières pour l'extraction d'agrégats, chose à laquelle l'Assemblée communale s'oppose. On ne peut pas dénaturer d'une telle manière ces magnifiques sites», soutient le maire, qui pense plutôt au tourisme pour sauver la commune et retenir les jeunes qui s'en vont. Le secteur des loisirs et de la jeunesse est tout autant à plaindre dans cette région sans maison de jeunes. Il y a bien des foyers éparpillés dans certains villages, mais cela ne répond pas aux attentes de la jeunesse. La salle de lecture du chef-lieu communal n'a pas encore reçu l'équipement nécessaire et la structure reste donc inexploitée. «L'APC a bien tenté de se faire doter d'une antenne 4G LTE, à défaut de la fibre optique, qui n'arrive pas chez nous. Cela ne pourra qu'aider à désenclaver la région en mettant à la disposition de la population l'internet, mais là aussi les responsables concernés ne nous aident pas», déclare le maire. Il soutient que les efforts de l'APC se basent sur l'ouverture des routes en temps de neige, une manière de ne pas paralyser encore plus les citoyens. «Il y a souvent des urgences, notamment sanitaires, qui n'attendent pas, il faut se préparer à toutes les éventualités», affirme Boualem Moussaoui, qui cite l'exemple des accouchements. Il n'y a en effet dans la région que deux dispensaires, mais pas de service de maternité. «Nous avons une ambulance avec laquelle nous assurons l'évacuation de nos malades vers Bouzeguène ou Azazga», nous dit notre interlocuteur. Rien ne semble être fait pour encourager la population à rester à Aït Zikki. Cette contrée retirée devient ainsi oubliée et ceci faute de programme de développement et d'investissement.