Faire ses bons comptes peut aider, surtout lorsque le créancier est l'Administration fiscale. Le code des procédures fiscales, qui traite des procédures de la détermination forfaitaire des bases imposables, mais également des procédures de contrôle de l'impôt, des procédures contentieuses et des procédures de recouvrement, a connu des modifications avec la récente loi de finances pour 2017. Principaux aménagements au Code des Procédures Fiscales pour les redevables de l'Impôt Forfaitaire Unique (IFU) La loi de finances pour 2017 a apporté une série d'aménagements pour les redevables de l'IFU. Entre autres mesures, le renvoi au mois de juin au lieu du 1er février de la déclaration de revenu imposable, ce qui accorde de la sorte plus de temps au contribuable pour apprécier son revenu prévisionnel et le déclarer entre le 1er et le 30 juin de l'année d'imposition. L'ancienne rédaction de l'article 1 du Code des procédures fiscales prévoyait qu'une déclaration spéciale, au modèle fixé par l'Administration fiscale, devait parvenir avant le 1er février de chaque année. La nouvelle disposition donne l'avantage, à tout exploitant imposable à l'IFU, d'une meilleure appréciation, à une date reculée, du niveau de chiffre d'affaires qui reste la base d'imposition pour cette catégorie de contribuables. Pour les nouveaux contribuables, cette déclaration doit être souscrite avant le 31 décembre de l'année qui suit celle du début de leur activité avec acquittement spontané du montant de l'IFU dû. Comme l'IFU peut s'avérer ne pas être un mode d'imposition adéquat, sur appréciation du contribuable, le Code des procédures fiscales prévoyait que les contribuables pouvaient opter pour l'imposition d'après le régime du bénéfice réel. Tel est également le cas des nouveaux contribuables, qui pouvaient, dès le début de l'exploitation, opter pour l'imposition suivant le régime du réel, indépendamment du montant du chiffre d'affaires réalisé. La nouvelle rédaction de cet article 3 prévoit que les contribuables qui relèvent du régime de l'IFU peuvent opter pour l'imposition d'après le régime du bénéfice réel, par option à notifier à l'Administration fiscale avant le 1er février de la première année au titre de laquelle les contribuables désirent appliquer le régime du bénéfice réel. Cette option est valable autant pour l'année de prise d'option que pour les deux années suivantes, pendant lesquelles elle est irrévocable. Ces nouvelles dispositions devraient permettre la stabilité dans la durée des régimes d'imposition avec plus de choix quant au régime à appliquer, alors que l'ancienne rédaction de l'article 3 prévoyait que dans le cas où, pendant la période d'imposition au régime du bénéfice réel, le contribuable n'atteignait pas le chiffre d'affaires de trente millions de dinars, il était automatiquement reversé au régime de l'IFU. Réaménagement de certains délais C'est, encore une fois, le domaine des prix de transfert qui a amené l'administration à se doter de temps supplémentaires pour l'appréciation des situations de transfert indirect de bénéfices. C'est pourquoi, autant dans le cas des vérifications ordinaires que celui des vérifications ponctuelles des comptabilités, que la loi de finances pour 2017 a introduit une prorogation du délai de vérification de six mois, lorsque l'Administration fiscale adresse, dans le cadre de l'assistance administrative et d'échange de renseignements, des demandes d'information à d'autres administrations fiscales pour étayer ses conclusions ou présomptions de transfert indirect de bénéfices au sens des dispositions de l'article 141 du Code des impôts directs et taxes assimilées. Ainsi les durées de contrôle, qui varient entre trois et neuf mois, selon l'activité et le niveau du chiffre d'affaires, ou à deux mois pour les contrôles ponctuels, déjà prorogées du délai accordé au contribuable vérifié, pour répondre aux demandes d'éclaircissement ou de justifications lorsqu'il y a transferts indirects de bénéfices, ou présomption selon le cas, pourront connaître une prorogation de six mois pour permettre aux demandes d'informations adressées aux autres administrations fiscales d'être instruites. En matière de TVA, un délai est fixé pour l'introduction des réclamations portant contestation des décisions prononcées sur les demandes de remboursement de crédits de TVA. Ces réclamations doivent être présentées, au plus tard, à l'expiration du quatrième mois qui suit la date de notification de la décision contestée. Cette disposition est logée au Code des procédures fiscales sous un nouveau paragraphe (sixième) de l'article 72 et de la sorte verse ces réclamations en procédure préalable auprès de l'administration des impôts, avant les procédures devant les commissions de recours. Un autre réaménagement de délai a trait à l'obligation faite au receveur des impôts de transmettre au redevable une lettre de rappel, quinze jours avant la notification du premier acte de poursuite, dans le cas ou un impôt ou une taxe n'aurait pas été acquitté à la date limite de paiement, à défaut d'une réclamation assortie d'une demande de sursis légal de paiement. Cette mesure est prise pour permettre aux contribuables de bénéficier d'une période préalable aux poursuites, ces dernières relevant de mesures de recouvrement plus coercitives. Les procédures contentieuses connaissent également une modification majeure qui permet à l'administration une collecte supérieure, à titre de garantie, de l'impôt contesté dans le cadre de la procédure de sursis de paiement. Les procédures font les bons comptes Au titre de la procédure préalable auprès de l'Administration des impôts, la procédure de sursis de paiement est largement connue sous l'expression du paiement des 20%. Pour le commun des contribuables redressés, la procédure de sursis de paiement est souvent interprétée, à tort, comme une mesure visant à procurer un répit ou pour déjouer la liquidation de la dette fiscale, appliquée aux situations de redressement, alors que cette somme est avant tout une garantie donnée à l'administration. En effet, si les délais d'instruction des différentes phases de recours accordent plus de souffle à la trésorerie des entreprises redressées, ils n'éteignent pas pour autant les pénalités de retard qui contribuent à une augmentation de la dette fiscale, souvent non appréhendée par les redevables concernés. Désormais, l'article 74 du Code des procédures fiscales, qui offrait la possibilité de surseoir au paiement des impositions contestées, en s'acquittant auprès du receveur compétent, d'un montant égal à 20% de ces impositions, à charge d'en solliciter le bénéfice dans sa réclamation, est modifié pour porter le montant de la garantie à 30%. La nouvelle rédaction de l'article 74 du Code des procédures fiscales intègre l'obligation de constituer des garanties propres à assurer le recouvrement des droits contestés, l'acquittement des 30% constituant une alternative à la constitution d'une garantie propre. Le paiement partiel au titre du sursis de paiement n'est donc plus le seul moyen de garantie, puisque la loi de finances pour 2017 revient à une ancienne disposition qui permettait la constitution de garanties propres, comme par exemple les garanties bancaires. Tout en relevant la proportion de dette à acquitter pour bénéficier du sursis légal de paiement, la nouvelle rédaction de l'article 74 du Code des procédures fiscales exclut de ce sursis les contribuables qui ont fait l'objet de majoration pour fraude fiscale et donne à l'administration le droit de dénoncer le sursis légal de paiement accordé en cas de survenance d'événements qui pourraient mettre en péril le recouvrement d'une créance fiscale. Dans les cas où les contribuables redressés ne sont pas satisfaits des décisions rendues en phase de recours préalable, la procédure devant les commissions de recours reste toujours accessible, avec la possibilité pour le réclamant, qui saisit la commission de recours, de bénéficier à nouveau de la procédure de sursis de paiement en s'acquittant d'une seconde somme égale à 20% des droits et pénalités qui restent en litige. Au total, le contribuable aura ainsi payé près de la moitié de la dette fiscale, majorations de retard comprises. C'est une manière de faire de bons comptes, certains diront plus à l'avantage de l'Administration fiscale. L'innovation apportée par l'article 74 du Code des procédures fiscales, en faveur du contribuable redressé, a trait aux cas avérés d'erreurs matérielles ou de doubles emplois, justifiés par des pièces probantes, pour lesquels le contribuable peut bénéficier du sursis légal de paiement sans avoir à constituer de garanties ou à s'acquitter les 30% du montant des impositions contestées, objets des erreurs ou doubles emplois. C'est dire que les bons comptes servent. Les procédures fiscales aménagées par la loi de finances pour 2017 devraient y contribuer, chacun devant y trouver son compte. Samir Hadj Ali Expert-comptable