La fermeture des routes est devenue en Algérie l'une des formes de protestation les plus prisées par les citoyens en mal de vivre. Ce phénomène se banalise de jour en jour à travers plusieurs wilayas du pays. Après Béjaïa, c'est dans la wilaya de Boumerdès qu'il est fait état régulièrement d'actions qui paralysent des heures durant le trafic routier. Hier, des centaines d'automobilistes empruntant la RN12, reliant Alger à Tizi Ouzou, en ont vécu l'amère expérience. Ces derniers ont été bloqués durant plusieurs heures dans d'immenses embouteillages à Naciria, à 40 km à l'est de Boumerdès. Cette fois-ci, la cause n'était pas un accident, mais bel est bien la furie qui s'est emparée de villageois n'ayant pas trouvé de réponse auprès des responsables de la wilaya concernant le blocage, depuis deux ans, des projets devant alimenter leurs localités en gaz naturel. Un cadre au niveau de la direction locale de l'énergie et des mines explique ce problème par le manque de budget. «L'Etat a dégagé plus de 500 millions de dinars pour ce projet, mais les deux entreprises engagées n'ont pas été payées depuis plusieurs mois», a-t-il indiqué. Néanmoins, d'aucuns soutiennent que si l'administration avait tendu l'oreille aux villageois, sans mépris, ces derniers n'auraient jamais recouru à la fermeture de l'autoroute. «Nous n'avions pas de choix. Cela fait plusieurs mois que nous protestons, en vain. Nous avions organisé une grève générale au niveau de toute la commune et bloqué l'accès au siège de la daïra et de l'APC à maintes reprises, mais aucun responsable n'a daigné nous écouter. Nous avions formulé deux demandes d'audience au wali, mais toujours sans réponse. La semaine dernière, son chef de cabinet nous a manqué de respect, en nous disant qu'il nous a accordé une faveur de nous avoir reçus dans son bureau», dénonce Karim Yassa, l'un des membres de la coordination des comités de village. Devant le silence des autorités, les protestataires affirment avoir décidé de revenir à la charge dimanche prochain, soulignant être décidés de bloquer même la nouvelle voie ferroviaire. Avant les villageois de Naciria, ce sont des jeunes désœuvrés de Si Mustapha qui ont fermé le même axe routier à la circulation. C'était avant-hier à l'issue de la visite du ministre des Travaux publics. Les concernés réclamaient des postes d'emploi au niveau de la gare ferroviaire de la localité. Quelques semaines auparavant, la RN12 avait été bloquée à hauteur de Bordj Menaïel par des habitants qui exigeaient la rénovation du réseau d'assainissement et d'AEP. En l'absence de culture du dialogue et face aux mépris qu'affiche l'administration, la route est le dernier recours, voire l'unique tribune où on exprime son désarroi dans l'espoir de se faire entendre.