De nombreux soldats algériens qui avaient intégré l'armée française avant la Guerre de Libération et qui sont morts en martyrs après avoir rejoint les rangs de l'Armée de libération nationale, sont enterrés sans que leur identité soit connue. Plusieurs années plus tard, des démarches en vue de les identifier et d'entamer les procédures de leur reconnaissance officielle en qualité de chouhada sont entreprises par un fils de chahid, Mohamed Ramdane Amara, en compagnie de l'ancien officier de l'ALN, Ouali Aït Ahmed, tous deux responsables dans l'association Tagrawla 1954-1962. Ces soldats inconnus sont enregistrés dans l'armée française sous le nom de Français de souche nord-africaine (FSNA), et catégorisés après comme «des enlèvements de postes», autrement dit, des déserteurs. Si Ouali, président de l'association, explique : «Il faut dire que ces soldats servaient de chair à canon pour l'armée française et ont fini par être gagnés par le sentiment patriotique. Ils voulaient rejoindre la Révolution et ce sont les femmes qui ont servi d'intermédiaires avec les responsables du FLN-ALN. Ces enlèvements de postes étaient salutaires pour notre Révolution. On était au lendemain de l'opération Jumelles de 1958. La Wilaya III historique avait perdu près de 8000 moudjahidine sur les 12000 qu'elle comptait et il n'y avait plus d'armes.» Selon le témoignage de cet ancien officier et les archives consultées par M. Amara à Vincennes, près de 28 «enlèvements de postes» ont été opérés. Ces FSNA ont emporté avec eux des effets militaires, des armes et des munitions. Pour leurs familles, ils sont tombés sous le drapeau français. «Notre démarche est de réhabiliter leur mémoire et de les faire reconnaitre par l'Etat algérien. Nous avons réussi à identifier deux martyrs enterrés à Aït Aïssi, à Yakouren. Nous engageons un même travail pour la mémoire de Bouladam Mokhtar, né en 1937 de Ferdj Mzala, et Kherab Mohamed, né en 1936 à El Milia, que nous avons identifiés. Notre association ouvre ses portes à leurs familles pour finaliser ce travail. Nous continuons nos recherches pour identifier d'autres», dit encore M. Amara. Celui-ci exhibe une pile de documents de l'armée française. Sur l'un deux, signé le 24 juillet 1960 par le commandant du 121e régiment d'infanterie, on peut lire : «Kharab Mohamed, né le 1er juillet 1936 à El Milia (Constantine) est un déserteur qui doit être arrêté et ramené au corps. Il a emporté son arme, 80 cartouches, une paire de jumelles n°7519, une grenade, des effets, etc.» Ces «enlèvements de postes» se sont déroulés pour la plupart à partir de 1956. L'implantation des postes militaires sont situés à Aït Khelili, Bouzeguène, Laârba Nath Irathen, Sidi Nâamane, Azeffoune, Yakourène et Tizi Ouzou. Si Ouali expliquera que ces soldats sont inconnus pour la raison suivante : «Ces conscrits sont envoyés en France pour suivre leur formation militaire et sont ensuite affectés dans des régions autres que les leurs. Et, c'est ainsi que ces soldats sont tombés au champ d'honneur en Kabylie et par conséquent, ils ne sont pas identifiés à leur enterrement.»