Les résultats des législatives sont une preuve supplémentaire que l'Algérie n'a, actuellement, pas pour ambition de s'inscrire dans la trajectoire de la démocratisation du pays. Le rendez-vous est ainsi ajourné à nouveau, contrairement aux fausses promesses des artisans d'un prétendu changement qui ont tout misé sur la révision de la Constitution pour mieux assouvir leur désir de duperie. Les résultats de cette consultation électorale sont en tout cas assez éloquents. Avec un taux national de participation de 38,25%, on vient ainsi d'avoir la confirmation sur les intentions du pouvoir de ne pas se démarquer d'un iota de son pari spécieux et inconsidéré sur «la stabilité». Il s'agit en effet de maintenir en l'état les rapports de force en présence, en assurant au parti-Etat, représenté sous sa double version FLN et RND, la majorité des sièges à l'APN et saupoudrer le reste entre les différentes petites et micros formations pour les besoins de la diversité. Grosso modo, la nouvelle Assemblée sera incarnée par la suprématie des principaux partis de l'administration, c'est-à-dire les nationalo-conservateurs, et les deux forces antagoniques (démocrates et islamistes), dont les poids équivalents devraient permettre de se neutraliser. Ainsi donc, ces élections n'ont pas permis de créer la surprise, à part, peut-être, une remontée remarquée du parti du directeur de cabinet de la présidence de la République, Ahmed Ouyahia. Une performance qui n'a de sens d'ailleurs que si on l'intègre dans le contexte de la compétition qui le met en concurrence avec son frère aîné, le FLN. Les résultats de ces législatives, qui ne devraient pas permettre de reconfigurer fondamentalement les actions politiques à venir, peuvent revêtir, en revanche, le caractère d'un véritable baromètre pour la prochaine présidentielle. Le régime dispose ainsi d'un levier important pour une certaine régulation des différents rapports de force qui le caractérisent. Et tout semble indiquer d'ailleurs que c'est le principal message qui ressort de cette consultation rejetée par plus de 60% des électeurs. Bien que le pouvoir ne semble pas indisposé par un tel échec cuisant à convaincre les citoyens d'aller aux urnes, il reste tout de même un motif d'inquiétude qu'il est une erreur de sous-estimer ou même d'ignorer ainsi qu'il semble étrangement vouloir le démontrer. Ces quinze millions et plus d'Algériens qui n'ont pas daigné aller voter doivent pouvoir signifier autre chose que ce que veulent bien admettre nos dirigeants. Une désaffection populaire d'une telle ampleur est synonyme d'un cri d'orfraie pour protester contre le système politique en place. La légitimité en prend un sérieux coup, alors que cette majorité qui a choisi de tourner le dos aux législatives taille en pièces tous les processus, électoraux et politiques. Autrement dit, l'Algérie est en proie à une crise politique qu'elle feint d'ignorer, faute de pouvoir engager de vrais chantiers de réforme démocratique. A ce titre, le pouvoir fait aussi mal en politique qu'en économie. Jusqu'à quand ?