Le débat s'anime à nouveau. Quelques jours avant l'installation de la nouvelle Assemblée populaire nationale (APN), les regards sont braqués sur le gouvernement qui doit, selon les usages, connaître un changement total ou partiel. Alors que la presse nationale, en l'absence de communiqué officiel, annonce des consultations avec des partis politiques en vue de composer le nouvel Exécutif, l'opinion et les observateurs de la scène nationale se posent de nombreuses questions : Abdelmalek Sellal présentera-t-il la démission de son gouvernement ? Sera-t-il reconduit ? Le nouveau Premier ministre sera-t-il issu de la nouvelle majorité parlementaire ? Les réponses à ces interrogations n'interviendront peut-être qu'après l'installation de la nouvelle Assemblée. En tout cas, la Constitution de 2016 n'oblige pas le Premier ministre à démissionner. «Ce n'est pas une coutume. Le seul qui a eu recours à cette pratique est Ahmed Ouyahia. Abdelaziz Belkhadem qui l'avait remplacé en 2006 n'a pas été contraint à la démission. Il avait précisé, à l'époque, qu'il appliquait le programme du président de la République», rappelle Fatiha Benabbou, professeur des universités et enseignante à la faculté de droit d'Alger. Faisant une lecture des différentes Constitutions depuis 1989, elle souligne qu'en Algérie où le régime est présidentialiste «il n'y a pas d'investiture parlementaire». «Seul le président de la République a le droit de nommer le Premier ministre et de le révoquer. Le chef de l'Etat ne délègue à personne cette prérogative en vertu de l'article 101 de la Constitution», explique-t-elle. «Le président de la République ne peut, en aucun cas, déléguer le pouvoir de nommer le Premier ministre, les membres du gouvernement, ainsi que les présidents et membres des institutions constitutionnelles pour lesquels un autre mode de désignation n'est pas prévu par la Constitution», lit-on dans l'article en question. Le bicéphalisme de l'exécutif supprimé De ce fait, ajoute-t-elle, l'APN n'a aucun droit de regard sur la désignation du Premier ministre, même si la nouvelle Loi fondamentale du pays évoque «la consultation de la majorité parlementaire». «Cette consultation ne dépasse pas le stade d'un simple avis», précise Fatiha Benabbou. Dans ce sens, elle rappelle le cheminement de la législation algérienne depuis l'avènement du pluralisme politique. «Les réformateurs ont voulu introduire subrepticement, dans la Constitution de 1989, une sorte de bicéphalisme de l'Exécutif avec un chef de l'Etat et un chef de gouvernement qui ont des pouvoirs. Il y avait, à l'époque, une volonté d'instaurer un régime semi-présidentiel. Dans la Constitution de 1996, le législateur a reproduit certaines dispositions qui créent de graves problèmes avec l'arrivée du président Bouteflika», souligne-t-elle, en citant les cas des démissions d'Ahmed Benbitour et Ali Benflis qui ont voulu défendre leur propre programme. La logique parlementaire, selon elle, a été complètement évacuée avec la révision de la Constitution de 2008. «Cette révision a levé toutes les ambiguïtés existantes, avec notamment le remplacement de la notion du ‘‘programme du gouvernement'' par ‘‘le plan d'action du gouvernement''. Le bicéphalisme de l'Exécutif a été également supprimé. Ainsi, le régime présidentialiste a été confirmé définitivement», indique-t-elle.