Une vidéo personnelle tournée dans un cadre privé a allumé le feu à la direction générale de Naftal. Près de 1500 travailleurs et cadres de la direction ont battu le pavé de la grande place centrale du siège de l'entreprise, hier. Une journée de protestation décidée par le syndicat pour demander le limogeage immédiat de Hocine Riseau, PDG de l'entreprise, accusé entre autres de figurer dans un enregistrement filmé, au contenu sexuel, qui tourne en boucle sur les ordinateurs du personnel. «C'est un scandale, accuse un cadre de l'entreprise. Je ne vois pas comment on peut continuer à diriger une entreprise de 31 000 travailleurs et se comporter de la sorte. Il est impératif que la tutelle réagisse et vite.» Au siège central, les travailleurs sont décidés à se débarrasser d'un patron qu'ils n'ont jamais aimé et qu'ils accusent de favoriser les cadres qui lui sont proches. «Depuis son arrivée à Naftal, M. Riseau s'est attelé à marginaliser les cadres, affirme un cadre de l'entreprise. Il s'est entouré d'une équipe qu'il a ramenée dans ses bagages, quand il dirigeait l'Enarga, filiale de Sonelgaz, et mis sur la touche ceux qui connaissent bien Naftal.» On reproche à M. Riseau de ne pas connaître le métier de la distribution, cœur du métier de l'entreprise. «Il vient de Sonelgaz et ne comprend rien à notre métier. Il n'a aucune expérience professionnelle dans le domaine», juge un syndicaliste. La gestion jugée «catastrophique» de Naftal depuis son arrivée, la «dilapidation des deniers publics» et l'«injustice», autant de griefs retenus contre le PDG, sans compter cette vidéo dont les effets vont bien au-delà du seul domaine privé, pour les cadres de l'entreprise. «Vous imaginez le chantage que l'on peut exercer lors des négociations avec une telle vidéo», juge un responsable, qui propose que tous les contrats signés par le PDG soient réexaminés. «Je suis sûr que certains l'ont été au détriment de l'entreprise», affirme- t-il. Enfermé dans son bureau et invisible, le PDG a chargé deux cadres de la société, Lazhar Adjroud, secrétaire général du Syndicat national Naftal, et M. Ramdane, directeur central juridique, de venir répondre aux questions des journalistes. Du point de vue juridique, M. Ramdane a annoncé le dépôt d'une plainte au niveau de la Gendarmerie nationale pour «atteinte à l'intégrité» de la personne du PDG et contre les agissements de ceux qui ont rendu publique la vidéo. Pour sa part, le patron du syndicat de la société a marqué sa différence avec le syndicat de l'entreprise, accusé de ne pas être représentatif. «S'ils étaient représentatifs, ils ne se cacheraient pas dans la foule», a-t-il accusé. Sans nier l'existence de la vidéo, le représentant des travailleurs estime que cela relève de la sphère privée et qu'il n'a pas à la commenter. «Cela ne regarde pas le syndicat, car la vie des gens ne m'intéresse pas. Seule la situation des travailleurs m'intéresse», a estimé M. Adjroud qui se dit par ailleurs convaincu d'une volonté de certaines parties de vouloir «déstabiliser l'entreprise» à travers la diffusion de cette vidéo. D'autant qu'«aucune revendication socioprofessionnelle ne m'a été adressée», a-t-il affirmé, une pierre jetée dans le jardin du syndicat de l'entreprise. Salim Mesbah