Une partie importante se joue en ce moment au Moyen-Orient. La monarchie wahhabite et ses alliés (Bahreïn, Emirats arabes unis, Yémen, Egypte et les Maldives) ont, contre toute attente, rompu leurs relations avec ce petit pays, le Qatar, qui compte un peu plus de 2 millions d'habitants, mais aux prétentions géopolitiques aussi farfelues (le mémorable échange avec la Russie) que peuvent le lui permettre, certes, ses revenus colossaux de vente de pétrole et gaz, mais pas seulement. D'aucuns s'interrogeaient, notamment au plus fort des révoltes arabes, sur le rôle de ce petit Etat aux initiatives disproportionnées à sa taille. Ses incursions répétées sur la scène internationale ont fini par faire admettre qu'un jeu de puissances des plus sournois constitue la base sur laquelle s'appuyait le richissime royaume qatari. Et maintenant ? Autre temps, autre politique. Si l'on avait quelque peu le soupçon que la nouvelle administration américaine était derrière ce sursaut spectaculaire de certains pays du Golfe, dont le chef de file l'Arabie Saoudite, de mettre au ban diplomatique leur voisin, voilà que Donald Trump a tenu à le faire savoir ouvertement en désignant du doigt sa cible. Cela a le mérite d'être clair. L'isolement du Qatar, a-t-il soutenu, marquera «peut-être le début de la fin de l'horreur du terrorisme». La messe est dite et tout le monde sait à présent pourquoi donc ces pays arabes ont décrété le voisin honni en décidant de couper toute relation diplomatique avec lui. En vérité, les Etats-Unis, qui n'ont jamais fait mystère de leur credo en matière de politique étrangère à la faveur de la nouvelle administration, visent à atteindre l'Iran, dont on n'admet pas le retour sur la scène internationale, tel que favorisé par l'ancien président Obama. Et le reste n'est qu'une suite logique à partir du moment qu'il s'agit d'amener le Qatar à s'inféoder à la nouvelle vision de lutte contre le terrorisme sous le leadership désormais du royaume wahhabite qui ne tolère plus, à l'instar du protecteur américain, de continuer à défendre certaines «organisations» qualifiées de terroristes ou de garder les mêmes bonnes relations avec la capitale du chiisme. En somme, cette nouvelle politique, si elle devait triompher, ne signifie ni plus ni moins que d'amener le Qatar au reniement de sa politique étrangère dans un premier temps... Car, ensuite, il y a lieu de se demander jusqu'où pourra aller le mis en cause dans sa quête de sortie de l'impasse. La récente visite de Donald Trump en Arabie Saoudite n'a pas révélé tous ses secrets. Et le risque d'un développement inattendu de la situation, par une espèce d'effet domino, n'est pas à écarter et pourrait même aller jusqu'à affecter les nouveaux contours de la crise syrienne, voire au-delà. La manière dont a été suivie d'effet la visite de Trump au Moyen-Orient laisse accréditer l'idée qu'une page vient d'être tournée au profit d'une autre, dont on commence à peine de prendre note.