La dernière soirée du Festival international de Timgad est à l'image de toutes les autres. Retards, approximations, mauvaise organisation et surtout des comportements bizarres qu'on ne voit pas ailleurs. Comme le chanteur vedette de la soirée qui prend carrément la fuite. En effet, à la fin de sa prestation, Cheb Mami est descendu de scène précipitamment, sans attendre la petite cérémonie honorifique prévue pour lui.Puis, il est monté dans une voiture et a quitté le théâtre. Rappelé par Lakhdar Bentorki, commissaire du festival, pour assurer ses obligations de médias, Cheb Mami expliquera qu'il a fait cela parce qu'il était extrêmement fatigué, étant un être humain comme les autres ! «On m'a programmé pour passer à 23h, j'ai dû attendre 1h30 pour monter sur scène», a-t-il déclaré dans un point de presse, soulignant le non-respect du temps par les organisateurs. Comble de l'ironie, pour le faire sortir, les vigiles ont menacé d'user de la force pour faire évacuer le hall par où le chanteur «fuyard» devait passer ! Un comportement à la limite de l'insulte. Pleins d'approximations donc, ayant garni les huit jours du festival. A commencer par les affiches et les banderoles entachées par des coquilles. Personne n'a jugé bon d'en refaire quelques-unes. Peut-être celles devant lesquelles sont tenues les conférences de presse. Lakhdar Bentorki, lors de sa dernière conférence de presse et après 1h20 de retard, a admis que pour la deuxième année consécutive, il y a une résistance du public. Selon lui, le ministre avait décidé que la gratuité de la culture était terminée et que c'est pour cette raison que le public ne vient pas nombreux aux soirées de Timgad. «Avant cette décision, seulement 10% des spectateurs de Timgad payaient leur billet», a-t-il justifié. Une drôle de feuille de vigne derrière laquelle se cache le responsable «du plus grand festival d'Algérie» et de «l'indépassable» ONCI. L'autre argument (pour justifier l'échec) du commissaire était que plus de 70% de la programmation est faite d'artistes algériens. Une approche qu'il regretterait presque, mais qu'il justifie en matraquant, tel un marteau-pilon, que la ville n'a pas de structures d'accueil et que ses habitants ne participent pas à la réussite du festival ! «Pas moins de 150 demandes de sponsors ont été envoyées, notamment à de grandes entreprises de la région des Aurès. Aucune réponse ! On considère cela comme du mépris», s'est-il justifié.
Sous le patronage du Président Ainsi donc, ce sont les Batnéens qui sont la cause de l'échec, décidément le ridicule ne tue point ! Qu'est-ce qu'on peut faire et déclarer sous le haut patronage du président de la République ! Et quelle serait la solution pour arrêter l'hémorragie, selon l'ONCI ? Bentorki affirme vouloir trouver des solutions pour revenir au site historique et élever l'événement au rang des festivals internationaux ! Mais ne se rend-il pas compte que c'est déjà un festival international ? En outre, concernant l'organisation elle-même, il n'y a pas eu de communication au début du festival «par manque de moyens», se justifiait M. Bentorki, et aucune prestation, durant les huit soirées, n'a débuté à l'heure, y compris les conférences de presse. Le manque de moyens en serait-il aussi la cause ? Manifestement, le patron de l'ONCI refuse de regarder la réalité en face. Qu'il est plutôt le problème et non pas la solution. Contre le bon sens, il veut maintenir un festival qui ne sert plus qu'à justifier, auprès du public, le travail dit «culturel» et de son office. Un enjeu qui ne concerne bien sûr qu'un cercle restreint aux intentions sur lesquelles pèsent des doutes. Interrogé par El Watan sur l'identité du festival, le commissaire n'a pas saisi la portée de la question en répondant que le thème du festival de Timgad c'était le festival de Timgad. Or, plus les années passent, plus il se dissout dans les pratiques organisationnelles de l'ONCI, qui l'a rendu un point de tournée parmi d'autres pour les artistes étrangers du moment. «S'il y a une organisation plus forte que nous, qu'elle prenne le festival. Il n'est pas important qu'on reste ou pas. Le plus important c'est le festival», nous déclare M. Bentorki, un peu sur la défensive, et sans convaincre par la sincérité. La sincérité justement souffre d'un déficit handicapant pour ce pauvre festival. Pour beaucoup d'acteurs de la culture de la région, c'est un défi à relever. Comment maintenir ce festival tout en se le réappropriant, lui donner une identité forte, un vrai projet, et non pas seulement des menus incohérents proposés à des gradins fatalement vides, comme pour cette 39e édition.