Toutes les factures de consommation domestique (eau, électricité et gaz) impayées verront la fourniture interrompue jusqu'au paiement total des redevances. Dorénavant, les mauvais payeurs des factures d'électricité, de gaz et d'eau vont être coupés de ce service public jusqu'à payement de leurs redevances. C'est la décision formelle prise par la Société algérienne de distribution de l'électricité et du gaz (SDC), la Société des eaux et de l'assainissement d'Alger (Seaal) et l'Algérienne des eaux (ADE). La cause est bien évidente : les créances de ces trois entreprises détenues auprès de leurs clientèles sont énormes. Malgré les efforts de recouvrements, ces créances sont loin d'être recouvrées dans leur totalité. En effet, dans un bilan arrêté à la fin de mars dernier, le montant des créances à recouvrer par la SDC a atteint 62 milliards de dinars. Les clients les plus endettés sont les ménages avec un taux de 46%. Les entreprises publiques, les opérateurs économiques et les administrations ne sont pas si loin derrière avec un taux de 40% de créances, soit plus de 24 milliards de dinars. Au moment où l'ADE affiche 40 milliards de dinars de créances non recouvrables et 14 autres milliards, créances vivantes à recouvrer ; la Seaal, quant à elle, annonce un chiffre de créances de 11 milliards de dinars. Un chiffre nettement loin de celui de la SDC et de l'ADE, mais assez élevé lorsqu'on sait qu'il s'agit des wilayas d'Alger et de Tipasa seulement. D'après Sofiane Azzizi, directeur de la clientèle à la Seaal, aujourd'hui le recouvrement est un souci majeur. «Près de 62% de nos créances sont détenues par les clients domestiques, représentant une somme de plus de 6 milliards de dinars. Même si nous avons mis en place tout un système complet de recouvrement, nous avons seulement 40% des clients qui payent leurs factures dans les délais. Nos clients les plus endettés après les ménages sont les administrations, avec un taux de 21% des créances, soit un peu moins de 3 milliards de dinars. Même si ce chiffre est plus bas que celui des ménages, il est tout de même important, si l'on prend en considération qu'il s'agit d'un petit millier d'administrations. En fin de compte, c'est 1% de nos clients qui représente 21% de nos créances. Le reste est détenu par les industriels et les sociétés privées qui sont plutôt de bons payeurs, malgré les créances», explique notre interlocuteur. Les coupures, ultime solution Face à cette situation qui affecte directement le service public et la santé financière de ces entreprises, les coupures demeurent aujourd'hui l'ultime solution engagée par ces dernières. La SDC déclare avoir déployé plus d'efforts pour le recouvrement à travers ses 355 agences commerciales sur le territoire national. «S'agissant des administrations et entreprises publiques qui sont investies d'une mission de service public, les coupures ne sont pas vraiment possibles mais plutôt des conventions et un démarchage régulier qui sont mis en place pour assurer le règlement des créances qui connaissent une régression graduelle. Pour les ménages, nous leur offrons plusieurs possibilités, à savoir l'échelonnement des dettes et autres facilités pour que ces clients puissent s'acquitter de leurs redevances énergétiques. Sinon, les coupures de courant électrique et du gaz constituent un ultime recours pour redresser la situation», explique Merzougui Fatma-Zohra, assistante de communication à la SDC. Pour la Seaal, d'autres démarches ont été entreprises avant de recourir à cette ultime solution qu'est la coupure. «Nous avons tout d'abord tenu à améliorer notre qualité de service en améliorant notre relation avec nos clients et en améliorant également notre travail, notamment le comptage et la facturation. Nous avons renouvelé plus de 700 000 compteurs en 11 ans de Seaal et également nos outils de relève de la consommation. S'agissant des coupures, nous pouvons couper, mais pas pour tout le monde, tels que les hôpitaux ou encore les résidences universitaires et les écoles. Pour ces dernières, nous le faisons durant les périodes de vacances, mais à la rentrée, nous sommes obligés de tout remettre en marche. Nos contraintes sont énormes avec ces entreprises publiques étant donné qu'elles sont sommées de passer par une procédure administrative compliquée et surtout lente, qui une fois terminée, une nouvelle facture est déjà arrivée. Pour récupérer notre argent détenu par ces clients, nous leur accordons un traitement spécial et avons formé un personnel spécialisé dans ce sens afin de bien gérer ce portefeuille client assez spécial», explique M. Azzizi qui ajoute que ces complications sont nettement moindres pour les ménages. Pour ces derniers, des échéanciers sont mis en place et, à défaut, les coupures. D'ailleurs, contrairement à la SDC et l'ADE, la Seaal a fait appel à des entreprises privées afin de l'aider dans cette procédure de coupure pour les clients réticents ou récalcitrants. Une chose est sûre, les coupures vont être monnaie courante durant les prochains mois.