Le visiteur qui espérerait pérégriner à Akbou, deuxième grande agglomération de Bgayet, après le chef-lieu de wilaya, serait glacé d'épouvante en découvrant une satrapie sombrant corps et âme dans des tas d'immondices. Au moment où tout le monde croyait que l'auguste assemblée communale, dans un sursaut d'orgueil, allait enfin prendre le taureau par les cornes, en nettoyant les écuries d'Augias, la cité n'a fait que s'enliser dans ses déjections fangeuses. Une gestion toujours aussi approximative et défaillante, trahie par des amoncellements d'ordures, des colis malodorants, des sacs-poubelle éventrés et des déchets jonchant le sol. Déjà qu'en temps normal Akbou peut être classée bonnet d'âne parmi les villes les plus insalubres. La fermeture récente de la décharge intercommunale par les habitants du village de Biziou est tombée comme une malédiction, transformant, par une espèce d'alchimie à rebours, la cité en une gigantesque décharge publique à ciel ouvert. Avec la grève cyclique des communaux, on a atteint l'acmé de la pollution ! Le spectacle est invariablement le même, que ce soit au cœur de la ville, dans les quartiers résidentiels ou les lotissements sociaux gravitant à la périphérie : une profusion de poches cloacales, laissant exhaler des effluves nauséabonds. Dans les quartiers populeux, et donc à gisement élevé de déchets, les monticules d'ordures, à force de macération et de putréfaction, laissent bien souvent sourdre des filets de lexiviat, s'écoulant sur la voie publique en ruisselets putrides. Même le travail des agents de la voirie, qui s'échinent à curer rues et artères et à décrotter venelles et culs-de-sac, est rendu de nul effet, dans la mesure où les déchets collectés finissent immanquablement par atterrir dans les dépotoirs improvisés aux quatre coins de la ville. «C'est une honte pour l'exécutif communal. Si ces élus n'arrivent pas à régler le problème des déchets, ils n'ont qu'à démissionner et rentrer chez eux», s'emporte un père de famille résidant au lotissement Mitidji. Afin de réduire le volume des déchets et en limiter les émanations fétides, des quidams recourent au pis-aller de l'incinération. «Nous sommes réduits à improviser des solutions, en attendant un hypothétique règlement de ce problème qui nous empoisonne la vie», dira un citoyen habitant un quartier de la vieille ville. Un autre citoyen résidant au quartier Sidi Ali, situé en surplomb de la ville, estime que «la responsabilité de cette situation calamiteuse est partagée entre les responsables de la collectivité et les administrés». Pour notre citadin, l'incurie des uns n'a d'égale que l'indolence des autres. «Les responsables municipaux ont incontestablement failli sur toute la ligne, et nous y avons contribué en adoptant la pire des postures, à savoir le silence et la passivité», clame-t-il.