La circulation automobile est difficile en cette matinée de dimanche à Dély Ibrahim. Pour arriver au portail de l'Université Alger 3, il faut faire preuve de patience. Les agents de la circulation, sous tension, dirigent le flux de véhicules tant bien que mal. Les transports de voyageurs publics et privés déchargent une masse de jeunes en plein embouteillage sans attendre l'arrêt prévu. Ce dimanche, c'est le premier des cinq jours dédiés à l'inscription des nouveaux étudiants. «On a cinq jours pour inscrire quelque 10 000 nouveaux étudiants», informe Rabah Chriet, recteur d'Alger 3. Dans l'enceinte universitaire il y a foule. De très jeunes adultes promus récemment au statut d'étudiants grouillent à la recherche d'informations pour s'acquitter des formalités d'inscription. Au niveau de la bibliothèque centrale de l'université, une vingtaine d'opérateurs informatiques attendent presque dans l'oisiveté l'arrivée des inscrits. Cette année, pour la première fois, l'utilisation de l'outil numérique a considérablement facilité la tâche aussi bien à l'administration de l'établissement qu'aux nouveaux étudiants. «Je me suis inscrite très rapidement. Grâce à mon invitation d'inscription, les formalités ont été vite exécutées», témoigne une étudiante tout juste inscrite à la faculté des sciences économiques, l'une des quatre facultés constituant l'université Alger 3. «Cette fois, l'opération est beaucoup mieux organisée que les années précédentes. Il n'y a pas le rush habituel, car les 10 000 nouveaux étudiants sont convoqués par tranche. Ils reçoivent une invitation pour une date précise. Sur place et grâce aux plateformes initiées par le ministère pour la préinscription et l'hébergement, il suffit que le nouveau bachelier présente sa convocation pour recevoir dans les minutes qui suivent sa carte d'étudiant, son certificat de scolarité et même son affectation pour la résidence universitaire pour les étudiants concernés», explique le recteur. «Ça m'a pris environ cinq minutes pour finir les formalités», témoigne une autre étudiante. A quelques mètres de la bibliothèque centrale, un amphi est dédié à l'inscription à la faculté des sciences de l'information et de la communication. Là, une cinquantaine d'étudiants attendent l'appel pour se rendre quelques mètres plus bas récupérer leur paperasse. «J'ai rempli un formulaire et j'attends qu'on m'appelle. Cela dure depuis une vingtaine de minutes déjà», déplore un jeune impatient. Les inscriptions universitaires 2017 ont donc marqué une avancée certaine dans la gestion par la voie de l'administration électronique. «Nous sommes dans la dernière phase des inscriptions universitaires. Nous avons mis à la disposition des nouveaux étudiants plusieurs plateformes, dont une pour les inscriptions universitaires et une autre pour l'hébergement afin de faciliter les démarches. Nous avons même créé une plateforme d'inscription dédiée aux titulaires de baccalauréats étrangers et aux bacs spécifiques pour que tout soit clair. Actuellement, nous sommes dans la phase administrative. C'est-à-dire l'inscription directe», explique Noureddine Ghouali, directeur général des enseignements et de la formation supérieurs au ministère de l'Enseignement supérieur. Mais loin de ce tableau idyllique, il reste que l'outil informatique n'est pas accessible à tous. «Beaucoup d'étudiants et de parents sont désorientés par les nouvelles démarches. Certains ne savent pas utiliser l'ordinateur. D'autres n'ont pas pu accéder à la plateforme d'inscription à l'hébergement. On est obligé aujourd'hui de faire face et d'informer tout le monde pour expliquer comment accéder à une chambre universitaire», constate un responsable des œuvres sociales pris d'asseau par les nouveaux inscrits. Mandats de payement plein les mains devant le bureau dédié aux œuvres sociales, un agent oriente, explique et prend en charge patiemment les demandes insistantes des jeunes fougueux. «Dans les grands centres universitaires, les inscriptions se passent assez bien. Mais nous avons des informations faisant état de complications au niveau des universités de Blida, Boumerdès, M'sila et Mostaganem où d'ailleurs nos comités de suivi de la rentrée universitaire ont été empêchés d'accompagner les étudiants dans leurs démarches, reniant ainsi la volonté affichée par le ministère de faire participer les partenaires sociaux dans la gestion des affaires universitaires», dénoncent Chia Bilal et Boudali Mohamed El Amine, respectivement président du comité de la rentrée universitaire de l'UGEL et son vice-président. Mais, au-delà de cet aspect facilitateur que permettent la gestion numérique et les plateformes informatiques, la démarche accentue par ailleurs la centralisation des décisions au niveau du ministère de l'Enseignement supérieur.
TRANSFERTS Et cet aspect ne plaît pas et n'arrange pas tout le monde. Actuellement, le sujet phare et polémique de la rentrée 2017 concerne les transferts. Lydia Gaouaoui, titulaire d'un baccalauréat en mathématiques avec une moyenne de 16,17/20, broie du noir. Orientée vers la filière sciences et techniques à Bab Ezzouar, elle refuse de s'inscrire et considère que son droit d'inscription en pharmacie a été usurpé. «Nous avons à notre niveau une liste ouverte de 75 bacheliers qui ont une moyenne supérieure à 16/20 et qui se disent lésés par l'orientation. Ils se retrouvent actuellement à suivre des cursus LMD auxquels sont inscrits des bacheliers qui ont à peine un 10/20», assure le représentant de l'UGEL. M. Boudali dénonce d'abord l'accès difficile à la plateforme de transfert «ouverte seulement pour deux jours (les 5 et 6 septembre)» à cause de la surcharge du site, ensuite les conditions limitatives du droit au transfert. «Les conditions sont draconiennes. Seuls les étudiants concernés par le mariage, le changement d'adresse ou sous tutorat d'un parent travaillant dans un corps de sécurité ont le droit de changer d'établissement. Nous avons des cas très précis et véritablement lésés, mais qui n'ont pas été pris en charge par le logiciel. Il y a eu énormément de refus», insiste le militant de l'organisation estudiantine. «Il faut en finir avec ces demandes de transfert qui n'ont aucun sens. Tout le monde veut faire médecine ou pharmacie, il faut comprendre que cela n'est pas possible. Nous avons clôturé cette phase et nous passons aujourd'hui à une autre (les inscriptions administratives, ndlr). L'année doit démarrer le 17 septembre. Il reste aussi l'organisation des concours, les masters, les doctorats, les résidanats, etc. Cela se fera durant le mois d'octobre», tranche le DG des enseignements. Interpellé sur la question des bacheliers qui ont des moyennes élevées et qui n'ont pas pu accéder à leur choix, M. Ghouali explique encore : «S'ils ont classé dès leurs premiers choix les grandes écoles et qu'ils n'ont pas pu y accéder, ils sont orientés vers le système LMD. Il faut comprendre que les écoles, ce n'est pas comme la fac de droit, on ne peut pas inscrire 2000 nouveaux étudiants. Les places sont très réduites.» De leur côté, les représentants de l'UGEL réclament l'ouverture d'une nouvelle session de transfert et que cela se fasse à la manière traditionnelle (dans les établissements). «Ou alors que la gestion de ces transferts se fasse au moins au niveau des conférences régionales des universités», préconisent-ils. Pour sa part, M. Ghouali informe que la seule opération qui sera faite sera la réouverture de la plateforme d'inscription les 19 et 21 septembre pour les étudiants retardataires qui, pour une raison ou une autre ne se s nt pas inscrits. Cette année, l'université algérienne compte quelque 330 000 nouveaux inscrits, ce qui augmente le nombre d'étudiant de 10% par rapport à l'année 2016.