Hasbellaoui Mokhtar, ministre de la Santé, était jeudi à Témouchent, moins pour une banale inspection de travail que pour évoquer la politique sanitaire qu'il veut mener. Le temps consacré à la visite des structures de santé, trois en tout sur cinq haltes, a été infime par rapport aux entretiens qu'il a eus avec les équipes médicales pour faire «passer des messages», selon son expression. Par le premier d'entre eux, il a recadré ses hôtes de l'administration sanitaire en leur demandant l'évacuation des chiffres sur les réalisations, leur préférant le tableau épidémiologique de la wilaya qui ne figurait pas au menu du data-show préparé : «Ce tableau me fournit les vrais indicateurs sanitaires de la wilaya. Ce sont ces chiffres que je veux entendre à chacune de mes visites d'une wilaya. Je suis venu m'enquérir des déficits qui entachent le système de santé et qui va retentir sur les conditions de travail du personnel de la santé.» A l'intention des praticiens, et au hasard des préoccupations soulevées, il a levé le voile sur «les grands chantiers de modernisation du secteur» qu'il est en train de mettre en chantier. Certains ne sont pas sans relation avec la chronique récente. Le scandale du décès de la parturiente de Djelfa le mois écoulé et la campagne de vaccination avortée l'année passée ont imposé la nécessité de la conception d'un programme spécifique. Concernant le premier, «nous travaillons sur un programme consacré à la périnatalité et la gestion de la grossesse chez la parturiente». La question tient à ce point au ministre qu'il a faussé compagnie à la délégation, au moment du déjeuner, pour une visite impromptue, en l'absence également de la presse, à l'EHS mère-enfant, où vient d'être observé un départ massif de gynécologues obstétriciens ayant terminé leur service civil. Pour ce qui est de la vaccination, «nous avons un grand dossier. Il faut expliquer aux médecins des UDS (Unités de dépistage et de suivi) l'importance de la vaccination, d'avoir le chiffre zéro pour ce qui est des maladies transmissibles. C'est cela qui reflète la bonne santé de la population. Il faut convaincre les parents que quoi qu'on fasse, il y aura toujours un risque. Mais par rapport à ce que nous avons gagné pour nos enfants, ce risque est pour nous insignifiant, même si lorsque nous avons un accident, c'est toujours une tragédie. Je suis prêt à l'assumer. J'ai mes enfants que je vaccine encore. La vaccination protège nos enfants et ceux des autres. Et puis, il ne faut pas l'oublier, la vaccination est obligatoire». La levée de boucliers contre sa circulaire relative à l'association des médecins privés au système des soins et de garde va trouver sa traduction dans des textes qui régissent la relation secteur public et secteur libéral. Il s'est adressé aux praticiens de ce secteur pour les aviser : «Quand nous avons un déficit dans une wilaya, les médecins spécialistes privés doivent être intégrés aux listes de garde des médecins du secteur public. Une loi de 1985 le prévoit. Il y a un seul système de soins avec une médecine libérale qui est payante et le secteur public. Ils doivent travailler en parfaite coordination. Il faut imaginer des passerelles entre les deux. Nous sommes en train de travailler dessus.» A une question d'un chirurgien privé sur la possibilité de réaliser certaines interventions complexes dans les hôpitaux publics, le ministre a acquiescé en y mettant une condition : «Il faut que l'acte soit gratuit pour le patient. Le DSP, dans le cadre d'une convention peut vous payer au tarif de la CNAS.» Lors de ses discussions à bâtons rompus, le ministre a indiqué que des programmes sont en préparation pour ce qui est de la prise en charge des maladies non transmissibles, sur la mobilité des services de santé, comme particulier avec des unités de soins mobiles, et l'informatisation des services de santé : «Chaque wilaya a conçu ses outils de gestion isolément. Il nous faut concevoir un logiciel-patient (dossier du malade) développé localement sur la base des différents dossiers électroniques existants. Le ministère des TIC va nous fournir son expertise.» Enfin, M. Hasbellaoui a exprimé l'intérêt qu'il y a de mettre en place «un schéma d'organisation des soins avec des réseaux bien identifiés aux malades. Il faut que chaque médecin qui pose un diagnostic, quelle que soit la pathologie, sache le circuit de cette pathologie et qu'on en finisse avec les réseaux d'amitié et la galère pour les malades».