Les pays limitrophes, comme l'Iran, la Turquie et la capitale Baghdad, ont déjà indiqué qu'ils ne reconnaîtront pas les résultats du vote. Alliés des Kurdes dans la guerre contre le terrorisme, les Etats-Unis ne voient pas, eux non plus, d'un bon œil la fin du cordon ombilical qui relie Erbil à la capitale fédérale Baghdad. Ces nouvelles réalités politiques ont réveillé les pulsions «agressive» et longtemps endormies du président kurde, Messaoud Barzani, dont le mandat présidentiel a pris fin en 2015. Usant d'un langage peu diplomatique, il a menacé de répondre avec le feu à toute entité ou groupe politique qui entraverait le déroulement du référendum ou refuserait de reconnaître ses résultats. Barzani a fait notamment allusion aux nombreuses tribus turkmènes et arabes vivant à Kirkouk, qui ont refusé de reconnaître la légitimité du référendum ou d'y participer. C'est le même cas aussi dans la ville de Dialla où les habitants ne veulent pas entendre parler d'un tel vote, réitérant ainsi leur «attachement indéfectible à Baghdad». Longtemps rêvé comme une solution politique idéale, le désir d'indépendance du Kurdistan pourrait tourner au vinaigre et devenir une source de nouvelles violences dans la région, déjà traumatisée par l'intervention armée américaine en 2003 et la guerre contre le groupe Etat islamique (EI). Selon des sources locales, les Peshmergas (armée du Kurdistan) ont renforcé leur présence dans de nombreux endroits du Kurdistan et autres points stratégiques, tandis que des officiels irakiens évoquent ouvertement la possibilité d'une nouvelle guerre civile. «Baghdad est claire. Elle ne reconnaîtra pas les résultats du référendum kurde», avait déclaré l'ancien Premier ministre irakien, Nour Al Maliki, alors que l'actuel, Haider Al Abadi, appelle Erbil à montrer plus «de sagesse et à choisir d'autres solutions moins radicales et moins déstabilisantes pour la région». Barzani déterminé Mais le président Barzani ne veut rien savoir. Il persiste et signe que le référendum aura lieu à la date prévue, car «il n'existe plus aucune autre alternative politique aux Kurdes à part le vote». Ces derniers jours, il a multiplié les interventions à la télévision pour expliquer que les Kurdes sont dans leur droit, lorsqu'ils veulent organiser un référendum d'indépendance, accusant chemin faisant Baghdad de tout faire pour pourrir la situation et de n'avoir pas montré une véritable volonté pour trouver une issue favorable au projet kurde. Barzani a promis de recourir à la violence en cas d'obstruction, ce qui laisse supposer qu'il y a une vraie possibilité de voir l'armée irakienne s'affronter avec les Peshmergas. Un scénario redouté par les pays de la région qui craignent un embrasement militaire généralisé. Les chiites irakiens ont rajouté une couche en indiquant qu'ils sont eux aussi opposés à l'indépendance du Kurdistan. Cette opposition généralisée au référendum va-t-elle pousser le président kurde à faire marche arrière ? Rien n'est moins sûr pour le moment, pour celui qui répète à longueur de journée que «le peuple kurde est souverain et c'est à lui que revient la décision de choisir son destin». En attendant, Erbil n'arrête pas de recevoir des personnalités étrangères de haut rang. La dernière fut le représentant du président Trump au sein de la coalition militaire internationale, Brett Mc Gurk. Celui-ci a déclaré que «Washington et d'autres capitales occidentales et arabes ont proposé une autre solution à Barzani à la place du référendum qui passe prioritairement par le dialogue entre Baghdad et Erbil». Mais il n'a pas précisé quel type de solution a-t-il vraiment proposé, réitérant au passage la position des Etats-Unis qui est contre le vote. «Nous avons besoin d'une parfaite coordination entre les Peshmergas et l'armée irakienne pour lutter contre Daech. C'est cela la priorité», a-t-il insisté, ajoutant que «l'organisation d'un référendum pourrait faire éclater l'union contre le terrorisme» dans la région.