Faut-il en rire ou en pleurer ? La déclaration d'un membre du gouvernement, en l'occurrence Youcef Yousfi, ministre de l'Industrie et des Mines, a vraiment de quoi surprendre. Notre responsable, qui a la charge de l'élaboration d'une stratégie performante, capable de relancer l'industrie nationale, avoue qu'il ne sait où donner de la tête tant qu'il ne dispose pas des indicateurs les plus basiques dans son domaine, à savoir les statistiques ! Cet aveu empreint d'honnêteté intellectuelle ne manque pas pour autant de mettre à nu une gestion à vau-l'eau d'un secteur censé être la locomotive de tous les autres compartiments de l'économie nationale. A l'heure où le discours est à la recherche d'autres opportunités d'investissement hors hydrocarbures, cette diversité industrielle tant ressassée pour sortir de la dépendance du pétrole prend alors l'aspect d'une utopie à laquelle tout le monde s'efforce de croire. Il n'y a que les véritables tenants du destin de l'Algérie qui en font leur miroir aux alouettes, histoire de calmer les esprits gagnés par l'inquiétude des jours à venir, tout en continuant à traire frénétiquement les mamelles du Sud et même à songer à exploiter le domaine non conventionnel du gaz et des hydrocarbures. La franchise de M. Yousfi devant les industriels du FCE a été une occasion de solliciter leur aide pour combler le déficit qualitatif et quantitatif des statistiques officielles. Ces dernières sont souvent triturées pour mieux satisfaire des caprices politiques conjoncturels plutôt que d'être des bases de données fiables sur lesquelles peuvent s'élaborer et se projeter diverses études et stratégies à moyen et long termes. Le manque d'indicateurs de l'économie nationale renseigne parallèlement sur l'ampleur de l'informel qui sévit dans le pays et qui échappe à tout contrôle fiscal et qualitatif. Le consommateur paie souvent de sa santé et parfois même de sa vie une production frauduleuse écoulée au grand jour et qui a pignon sur rue ! Les causes de ces contradictions illogiques tiennent, en partie, leur explication dans la seconde déclaration de notre ministre de l'Industrie et des Mines à l'adresse des mêmes chefs d'entreprise, quand il les rassurent en précisant bien que «ce n'est pas pour vous espionner ou communiquer ces informations à l'administration fiscale, mais pour mettre une information économique fiable à votre disposition». Ainsi donc, la complicité est garantie à l'échelle officielle quant à l'anarchie et la fraude qui gangrènent la production nationale. Espérons alors que cet esprit ne s'empare pas de nos policiers et de nos gendarmes, quand ils se retrouvent face à un voleur ou un criminel !