La grande majorité des quartiers et lotissements d'habitation se trouvant dans le périmètre de la commune de Bordj El Kiffan, a été érigée dans l'improvisation et l'anarchie. Des quartiers tentaculaires, comptant des milliers d'habitations et ne répondant à aucune norme urbanistique, ont vu le jour en l'espace de quelques années seulement. En dépit de leur ancienneté, ces fractions de la ville se retrouvent dépourvues d'aménagements urbains, tels que le réseau d'assainissement, l'éclairage public et le revêtement en bitume. D'après un ancien habitant de Bordj El Kiffan, «ces lotissements ont été créés durant les années 1990. Le DEC, qui assurait la gestion des affaires de l'APC, a concédé des lots de terrain sans aucune étude préalable. Le trafic et la dilapidation ont atteint leur paroxysme durant la décennie noire, même les terres agricoles ont été sacrifiées sur l'autel de la dépravation. Des individus se sont alors enrichis au détriment de l'ordre et de l'organisation. C'est comme cela que sont nés ces lotissements anarchiques et sans âme», déplore-t-il. Les responsables de l'APC distribuaient les lots de terrain aux particuliers, sans la réalisation du moindre aménagement. «Les aménagements de base n'étaient pas réalisés au moment opportun. Il fallait faire avec. Pour l'assainissement, par exemple, les fosses septiques faisaient l'affaire. Pour l'eau potable, il fallait creuser des puits et pour l'électricité pirater le réseau public, etc.», confie-t-il. Que ce soit à Mouhous, Rassauta, Ben Redouane, Ali Amrane, Sidi Dris, Benzerga ou encore à Ben Merabet, la situation est pratiquement la même. Des portions de ces quartiers ont bénéficié de quelques travaux, comme le revêtement en bitume de certaines artères principales, sans plus. A Mouhous, la plupart des habitations ne sont pas raccordées au réseau d'assainissement. «Nous avons creusé une fosse perdue, qui doit être vidée périodiquement. La vidange coûte pas moins de 10 000 DA», dira un habitant. Toute une activité commerciale gravite autour des fosses septiques. «Des particuliers ont investi dans des camions de curage et de vidange qu'ils louent au prix fort», assure-t-il. Aussi paradoxal que cela puisse paraître, ces camions de curage vident leurs chargements d'eaux usées dans le réseau d'assainissement, à quelques dizaines de mètres seulement du lieu de la collecte, car le réseau d'assainissement à Mouhous se limite aux seules artères principales. Les ruelles secondaires en sont totalement dépourvues. S'agissant de l'eau potable, la majorité des quartiers de Bordj El Kiffan en est dépourvue. Pour pallier ce problème, les habitants ont recours au piratage. Des particuliers font payer les habitants pour des raccordements illicites. A Mouhous et à Harrga, des propriétaires d'engins excavateurs creusent des tranchées et installent des canalisations. Ils raccordent ensuite les habitations à ces canalisations, en contrepartie d'une somme d'argent. Outre ces problèmes, ces quartiers manquent d'équipements publics rudimentaires, tels que les bureaux de poste, les annexes administratives, les maisons de jeunes et les centres culturels. «Des milliers de maisons pour lesquelles rien n'a été prévu. C'est la preuve que les pouvoirs publics gèrent de manière hasardeuse la ville. C'est le moins que l'on puisse dire», conclut-t-il.