L'ISIE ne s'est pas remise sur ses pieds depuis la démission, en mai dernier, de son président Chafik Sarsar, et deux de ses membres, Lamia Zargouni et Mourad Ben Mouelhi. Certes, les trois membres ont été entre-temps remplacés, mais l'ARP n'arrive pas à trouver un remplaçant à Sarsar, ni à procéder au renouvellement du tiers des membres de l'ISIE, comme l'indique son règlement intérieur, mettant en péril la crédibilité de l'instance. Chacun des deux mastodontes de la vie politique tunisienne, Nidaa Tounes et Ennahdha, défend «son» candidat pour présider l'ISIE, empêchant de parvenir à un consensus. Chaque camp avait changé «son» candidat entre les deux tentatives, comportant chacune deux tours, pour l'élection du président de l'ISIE. Le président intérimaire de l'ISIE, Anouar Ben Hassen, a confirmé à El Watan que ces tiraillements ont négativement marqué l'image de l'ISIE auprès de l'opinion publique. «Le nouveau Président aura fort à faire pour retrouver la confiance des Tunisiens», a-t-il dit. Ben Hassen a précisé que le bureau de l'ISIE a rencontré, vendredi dernier, le président de l'ARP et examiné avec lui la situation prévalant dans l'instance électorale, suite aux rebondissements à répétition qu'elle ne cesse de subir en raison des reports continus de la date des élections municipales et des difficultés rencontrées pour l'élection du président de l'ISIE et le renouvellement du tiers de ses membres. «On a dû rompre les contrats de 663 employés de l'ISIE, suite au report des municipales prévues auparavant en décembre 2017. Et même la date du 25 mars 2018 ne saurait marcher, si l'ARP ne parvient pas à élire le président de l'ISIE dans la semaine en cours et si elle n'avance pas dans le code des collectivités locales», a encore précisé l'actuel premier homme de l'ISIE, catalogué comme nahdhaoui par les observateurs. Peur des résultats Le député Mustapha Ben Ahmed, président du bloc parlementaire nationaliste, pense que le blocage autour de l'ISIE ne va pas se résoudre définitivement dans les semaines à venir, même si l'on parvient à élire un président pour l'instance électorale. Selon lui, la majorité des partis politiques, hormis les islamistes d'Ennahdha, ne veulent pas de ces élections avant les parlementaires et la présidentielle de 2019. «Il s'agit d'une élection à mi-parcours et la classe politique a peur des résultats de ces joutes électorales, qui peuvent avoir des conséquences sur 2019», explique-t-il. Même son de cloche du côté du Dr Sahbi Ben Fraj, député du bloc Al Horra du parti Machrouaa Tounes, dirigé par Mohsen Marzouk. «Les islamistes d'Ennahdha font pression pour obtenir des concessions politiques de leur partenaire au pouvoir, Nidaa Tounes, car Rached Ghannouchi est convaincu qu'il n'y aura pas d'élections municipales avant les joutes de 2019», explique-t-il. Pour Dr Ben Fraj, Nidaa Tounes peut facilement bloquer le Code des collectivités locales et être sûr que les élections municipales n'auront lieu qu'au moment opportun, selon eux. Toutefois, comme n'ont cessé de le constater les observateurs et même le président intérimaire de l'ISIE, Anouar Ben Hassen, la crédibilité de l'ISIE est fortement ébranlée en raison de ces tiraillements et ces rendez-vous ratés, portant gravement atteinte à son image auprès des électeurs. «L'avenir de la démocratie n'est pas encore certain en Tunisie. Nous ne sommes pas sûrs de la tenue des élections de 2019, si l'on bloque l'élection du président de l'ISIE», a affirmé le président d'Ennahdha, Rached Ghannouchi, juste après le renvoi des élections municipales, prévues alors en décembre 2017, pour faire pression sur Nidaa Tounes, en pleine crise. L'avenir continue à être incertain en Tunisie, avec une crise économique aiguë et une situation politique confuse. La situation de l'ISIE se complique davantage.