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Mobilisation sur fond d'appréhension en Kabylie
Marches des étudiants pour tamazight aujourd'hui
Publié dans El Watan le 11 - 12 - 2017

L'onde de choc provoquée par le rejet d'une proposition d'amendement au profit de tamazight par la commission juridique de l'APN ne s'arrête pas.
Que ce soit à Béjaïa, à Tizi Ouzou ou à Bouira, depuis quelques jours, les rues de la Kabylie renouent avec la fièvre de la revendication identitaire.
Des marches de protestation s'y déroulent un peu partout depuis que ce rejet a été rendu public.
Hier, des lycéens sont sortis dans plusieurs localités de la wilaya de Béjaïa, comme à Aokas et El Kseur, pour marcher pour tamazight, emboîtant le pas à leurs camarades de nombreuses autres communes des wilayas de Tizi Ouzou et de Béjaïa qui sont sortis dans la rue la semaine passée, brandisssant banderoles et drapeaux amazighs.
Ce mouvement de rue, grossi par un effet d'entraînement inattendu, intervient en pleine période des examens du premier trimestre, déjà perturbés par la grève illimitée du Cnapeste. Le climat n'est pas différent à l'université où la colère gronde.
Aujourd'hui, les rues de Béjaïa et de Tizi Ouzou vont vibrer sous les pas de milliers d'étudiants mobilisés pour battre le pavé dans une marche que l'on veut être celle «du peuple».
A Béjaïa, les étudiants marcheront ce matin vers la place Saïd Mekbel sous la houlette de la coordination locale des étudiants qui a appelé à une grève qui paralyse les deux campus depuis une dizaine de jours. La manifestation synchronisée est organisée pour deux objectifs : dire non à la loi de finances qui vient d'être adoptée par la majorité présidentielle et revendiquer «la promotion, la généralisation et la mise en œuvre juridique et institutionnelle de la langue tamazight».
Les communautés lycéenne et estudiantine bouillonnent alors que des voix sages, mais rares, tentent de ramener le débat sur un terrain fertile, tout en sensibilisant sur une «mauvaise» interprétation des faits et rendant compte de la distinction entre une loi et une proposition d'amendement. «La distinction est plus qu'impérative», écrit Brahim Tazaghart, ancien militant du MCB, dans une contribution publiée par El Watan.
«Un débat enclenché sur la base de fausses informations, de confusions, du mauvais usage des concepts, de manipulations des mots est voué à l'échec. L'éthique politique, la morale militante, la noblesse de notre combat ne nous permettent pas de tricher avec la population, de mentir devant le peuple, de déformer la formation politique de nos étudiants et de notre jeunesse», affirme B.
Tazaghart qui soutient, cependant, les manifestations pacifiques des lycéens et des étudiants. Y a-t-il eu mauvaise communication ? M. Tazaghart le croit et, selon lui, c'est elle qui a autorisé les questions des lycéens, étudiants et de la rue «telles que : c'est vrai qu'ils veulent supprimer l'enseignement de tamazight ?» En reprochant aux partis politiques de laisser, par leur silence, la voie aux «manipulateurs», il les invite à défendre la promulgation de «la loi organique» qui doit suivre pour la mise en œuvre de la constitutionnalisation de tamazight, langue nationale et officielle en 2016.
La seule réaction des partis a été celle du RCD et du FFS qui accusent tous deux le PT de «manipulation». Le RCD dénonce «l'effet de manipulation recherché par le PT», et le FFS accuse le même parti de «manœuvres de manipulation de l'opinion». Loin des querelles partisanes, qui calmera la rue ? La protestation des lycéens et étudiants continue et gagne même le soutien de la société civile, dont certaines organisations ont appelé à rejoindre les marches d'aujourd'hui.
Pour la coordination des étudiants de Béjaïa, le message est clair, le pouvoir «persiste dans sa marginalisation de notre identité millénaire ‘‘tamazight'' par le refus catégorique de sa promotion, sa génération et sa mise en œuvre juridique et institutionnelle comme langue nationale et officielle». Les tenants du pouvoir sont accusés de s'attaquer «aux fondements mêmes de la nation, à savoir son identité».
En même temps qu'elles crieront le rejet des «lois antisociales et antipopulaires», les marches d'aujourd'hui dénonceront surtout «la précarisation de la culture amazighe» et rappelleront l'atmosphère des manifestations d'avant la constitutionnalisation de tamazight.


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