Les lycéens de Kherrata, El-kseur Aït R'zine, Biziou et Akbou ont marché spontanément hier. En prévision de la manifestation de rue que les étudiants de Béjaïa comptent mener aujourd'hui, les assemblées générales se multiplient dans les résidences universitaires, sur le fond d'une grossière manipulation. Entre la méfiance des exploitations politiciennes et les infiltrations insidieuses, la tension est montée de plusieurs crans. En témoigne la marche initiée dans la nuit de samedi à dimanche. La colère, née du rejet de la loi portant promotion de tamazight proposée par la députée du Parti des travailleurs, s'est greffée à d'autres considérations, dont le moins qu'on puisse dire, sont infondées. Jusqu'à hier, l'idée selon laquelle les pouvoirs publics allaient supprimer l'enseignement de la langue amazighe dans les universités et les lycées s'est propagée dans le milieu estudiantin au point de devenir l'élément mobilisateur. Toute la confusion est là. Elle concerne essentiellement les motivations de la marche. Si dans sa dernière déclaration-appel, le collectif des étudiants de l'université Abderrahmane-Mira ont motivé leur manifestation par la question de l'officialisation de tamazight, les questions identitaires ainsi que l'obligation et la généralisation de son enseignement restent posées estimant qu' aucun signe d'évolution vers les attentes légitimes des citoyens ne se dessine à l'horizon, il n'en demeure pas moins que dans les coulisses ont fait courir la rumeur de sa suppression pure est simple. Les propos d'un étudiant rencontré dans la soirée de samedi confirme cette confusion entretenue pour mobiliser le maximum de participants à la marche d'aujourd'hui. «Nous allons marcher pour dénoncer la suppression de tamazighth dans les lycées et l'université», affirme-t-il laissant clairement croire que beaucoup d'étudiants ne savent pas exactement pourquoi ils marcheront. Dans le document du collectif, le pouvoir à travers le vote des députés de la majorité contre la généralisation et l'obligation de l'enseignement de tamazight, «n'agit que pour le reniement de ses engagements». Une autre confusion sciemment entretenue par notamment les «indépendantistes», qui font souvent référence au vote des députés FFS et RCD, dont l'abstention est considérée comme un «vote contre tamazight» alors que dans les faits, les députés de ces deux partis se sont abstenus de voter pour la loi de finances 2018. Les étudiants parlent d' «un semblant de réhabilitation», citant l'article 4.3 de la Constitution, qui à leurs yeux «porte atteinte au vivre ensemble des citoyens» et «n'est que pour la pérennité du système rentier liberticide responsable d'un délitement sans précédent des institutions de l'Etat, et engage toute une nation vers un avenir incertain». Auparavant, une précédente déclaration, a été annulée car jugée très politique et proche de l'extrême droite à travers le vocabulaire utilisé. C'est dans cette atmosphère de «manipulation et de confusion totale que les étudiants appellent la société civile, les enseignants et les étudiants à une marche aujourd'hui du campus d'Aboudaou vers la place Saïd Mekbel et ce pour «une loi organique portant mise en oeuvre de la reconnaissance de tamazight comme langue nationale et officielle, telle que stipule la Constitution de 2016 et l'obligation et la généralisation de l'enseignement de la langue amazighe partout et pour tous, du préscolaire à l'université. L'intervention du secrétaire général du HCA et celle du Premier ministre dont le programme comporte le lancement officiel de l'académie amazighe semblent n'avoir pas convaincu les étudiants récalcitrants. La tension monte un peu partout dans la région. Hier les lycéens de Kherrata, El-kseur Aït R'zine, Biziou et Akbou ont marché spontanément. D'autres l'ont fait les jours précédents. Il reste à espérer un déroulement serein de la manifestation l'éloignant du piège de la violence.