Alors que le secrétaire général de la Ligue arabe tente une médiation, le Conseil de sécurité de l'ONU a un avis tranché sur la crise libanaise. Conséquent avec son vote de septembre 2004 (résolution 1559), l'instance onusienne a, en effet, exprimé mardi son « appui sans réserve » au gouvernement libanais de Fouad Siniora et condamné les tentatives de déstabiliser le pays. Le Conseil « engage tous les partis politiques libanais à se montrer responsables afin de prévenir, par le dialogue, une nouvelle détérioration de la situation au Liban », poursuit la déclaration. Il « réaffirme son ferme attachement à la souveraineté, l'intégrité territoriale, l'unité et l'indépendance politique du Liban à l'intérieur de ses frontières internationalement reconnues et sous la seule et exclusive autorité du gouvernement libanais », ajoute-t-elle. La déclaration, non contraignante mais qui nécessitait l'unanimité du Conseil pour son adoption, avait été proposée par la France, à la suite de la parution, le 1er décembre, d'un compte rendu du secrétaire général de l'ONU, Kofi Annan, sur la mise en œuvre de la résolution 1701, qui avait mis fin à l'agression israélienne de juillet-août contre le Liban. L'adoption de cette déclaration survient alors que le Liban est en pleine crise politique, gouvernement et opposition ne parvenant pas à s'entendre sur un cabinet d'union nationale, sur fond de manifestations permanentes de l'opposition dans les rues de Beyrouth. C'est dans un tel contexte que le secrétaire général de la Ligue arabe a entamé mardi une mission délicate de médiation à Beyrouth pour tenter de trouver une issue à la crise politique. M. Amr Moussa lui-même se montre incroyablement prudent, et a tenu à mettre en garde les Libanais contre tout optimisme. Après une première série d'entretiens avec Fouad Siniora et le président du Parlement Nabih Berri, un des chefs de l'opposition s'est contenté de dire : « Il y a de l'espoir (...) mais nous n'en sommes qu'au début. » M. Moussa a également rencontré pendant une heure dans la soirée le chef du Hezbollah Hassan Nasrallah. L'opposition, conduite par le Hezbollah, exige en priorité la formation d'un gouvernement d'union nationale où elle détiendrait une minorité de blocage. Elle organise depuis le 1er décembre des manifestations pour obtenir gain de cause. La crise politique a été ouverte par la démission à la mi-novembre des six ministres, dont cinq chiites représentant le Hezbollah et le mouvement Amal. Le gouvernement refuse toujours l'idée d'un droit de veto pour l'opposition au sein du cabinet. « A aucun moment nous ne pourrons admettre la dictature de la minorité », a dit l'ancien président Amine Gemayel. Pour lui, le fait d'accepter la demande d'un droit de veto signerait « la fin des institutions libanaises », alors que la présidence de la République et du Parlement sont dans le camp de l'opposition. « La mission arabe, qui avait soulevé un vent d'optimisme, paraît dans l'impasse, les divergences entre les deux camps étant toujours aussi profondes et l'initiative telle qu'elle est présentée ne constituant pas une issue à la crise », écrivait, mardi, le journal As Safir. Le plan de la Ligue arabe prévoirait notamment « l'arrêt de l'escalade dans la rue », « un accord pour la formation d'un gouvernement avec une minorité de blocage (droit de veto), conformément à des règles à définir », « le retour au dialogue », suivi d'un accord sur les questions litigieuses. Ces questions concernent le Tribunal international chargé de juger les assassins de l'ancien Premier ministre Rafic Hariri, les élections législatives et présidentielle et la tenue de la conférence économique internationale, prévue fin janvier à Paris. Le projet de tribunal est à l'origine de la démission, peu avant l'adoption du texte par le gouvernement, des six ministres qui estimaient n'avoir pas été préalablement consultés sur le projet. La majorité, qui accuse le régime de Damas d'être lié à l'assassinat le 21 novembre du ministre chrétien Pierre Gemayel, soupçonne l'opposition de vouloir faire barrage à la création du tribunal pour dissimuler une éventuelle implication syrienne dans l'assassinat de Rafic Hariri en 2005. Le gouvernement libanais a transmis mardi au Parlement le projet de création d'un tribunal à caractère international en vue de sa ratification. Le même jour, le président de la commission d'enquête de l'ONU, Serge Brammertz, a présenté un nouveau rapport d'étape où il indique que la Syrie coopère de manière « globalement satisfaisante » à l'enquête. Une version contestée par l'ancien général Michel Aoun, ennemi juré des Syriens, pour l'avoir défait militairement et contraint à l'exil. On ne peut pas dire de lui qu'il s'opposerait à une telle situation si elle venait à se produire. Mais toujours est-il que le problème est autre, et qu'il a décidé de s'allier au Hezbollah dans la contestation contre la majorité parlementaire.