Parlez-nous de votre compagnie... L'association Les grandes personnes est un collectif d'artistes de spectacles de rue constitué autour de l'envie d'ouvrir l'art au plus grand nombre. Depuis plus de 15 ans, elle met en avant la pratique participative et le travail collectif. Ses créations s'inspirent souvent des arts populaires mêlant arts plastiques et expression théâtrale. Comment est né le projet Des rues, des rêves ? Il est né de la rencontre entre l'Etoile culturelle d'Akbou, l'association Touiza solidarité et la compagnie Les grandes personnes, autour d'un désir commun de créer des formes artistiques dans l'espace public algérien. Pour les stagiaires impliqués dans le processus, ce projet est un travail d'appropriation, qui prend son sens quand il associe des connivences et des oppositions sociales, des similitudes et des diversités culturelles. Alors s'aménage un espace de tolérance où chacun, peu importe son histoire et ses idées, peut trouver une place et reconnaître celle des autres dans une participation à une création collective et de révéler le potentiel de chacun. Comment une marionnette géante peut-elle changer le regard sur l'espace public ? Hautes de près de 4 mètres, ces marionnettes sont visibles au milieu d'une foule et évoquent des mythes universels. On ne choisit pas de les voir, elles s'imposent, elles envahissent pacifiquement l'espace de chacun et interpellent. Elles amusent, fascinent, dérangent aussi. Humainement, elles sont un symbole fort des pratiques collectives et du travail d'équipe. Pensez-vous que l'espace public algérien peut accueillir ce projet ? Il va l'accueillir les bras ouverts car nos stagiaires nous le disent beaucoup, il est très rare d'accueillir des projets dans l'espace public et en même temps il y a une forte demande des Algériens pour ce type de proposition. Quelle est pour vous la particularité de la Kabylie ? Les créations proposées par Les grandes personnes s'appuient sur les traditions populaires. Ici en Kabylie, c'est le personnage du conteur public qui est très vite apparu dans les échanges menés avec différentes personnalités kabyles. C'est sur cette immense tradition orale que se sont appuyées l'écriture et la conception du spectacle avec l'ensemble des participants du projet. Votre compagnie trouve ressource dans les arts de l'oralité, quelles sont vos autres sources d'inspiration ? Le travail de la compagnie est surtout axé sur les arts visuels dans la rue, les couleurs, les formes, les mouvements, avec une complémentarité selon le contexte avec les arts de théâtre, le conte, la danse… Parce qu'il y a une tradition orale très forte en Kabylie, nous avons été amenés à développer ce travail autour de l'oralité de façon plus spécifique : c'est là que joue l'échange ! En quoi le projet Des rues, des rêves peut-il contribuer à la préservation du patrimoine kabyle ? Les créations que nous menons portent en elles l'identité des gens avec lesquels nous travaillons. Ce n'est pas une vocation pour nous de promouvoir la culture kabyle, mais nous proposons un outil d'expression que les gens s'approprient et avec lequel ils pourront, s'ils le souhaitent, développer ces questions liées à leur identité et leur patrimoine culturel. Quelles seront vos prochaines étapes ? A partir du mois de février, l'ensemble du spectacle reste à Akbou et sera pris en charge par ceux-là mêmes qui ont participé à sa création. Ils seront libres de proposer des spectacles et animations avec ces éléments, de constituer un réseau plein d'artistes capables de transmettre et de développer des pratiques dans l'espace public algérien. Que pouvez-vous dire aux habitants d'Akbou, Béjaïa et Bouzeguene ? Nous espérons qu'ils soient séduits par ces marionnettes, ces masques, et fiers de toutes les personnes qui ont contribué à la création de ce spectacle. Il est le résultat d'une collaboration et d'une solidarité impressionnante qui dépasse largement le cadre des participants. Cette capacité de création est le fruit d'une mobilisation et d'un enthousiasme qui en font une aventure extraordinaire. Encouragez vos jeunes à s'ouvrir à l'art sous toutes ses formes, à avoir des initiatives comme celles-ci et à les mener au bout et le plus loin possible. Le spectacle est le récit d'une jeunesse qui a envie d'émancipation, de création, et qui voit dans l'art un outil nécessaire pour surmonter les obstacles de la vie. Le spectacle a plusieurs niveaux de lecture, et, nous le souhaitons, des images fortes propices à parler à tout un chacun.