Les représentantes de ces deux associations se concertent en vue de publier un communiqué commun, où il sera notamment question des actions à entreprendre pour dénoncer ces mesures de l'administration. Depuis la mise sous scellés des associations féministes Fard et Afepec et la fermeture de trois églises protestantes à Oran, Aïn El Turck et Arzew, les réactions d'indignation ne cessent de pleuvoir, tout aussi bien à Oran que dans le reste du pays. Le bureau d'Oran de la Ligue algérienne des droits de l'homme n'est pas allé de main morte pour condamner ces mesures, jugées arbitraires. «Le bureau d'Oran de la LADDH a été informé que deux associations dont le siège est à Oran viennent de voir la mise sous scellés de leurs sièges, par les services de police, sur instruction du DRAG de la wilaya d'Oran, donc du wali d'Oran. De même, des associations religieuses relevant de l'église protestante viennent d'être sommées de mettre fin à leurs activités», écrit Kaddour Chouicha, président de la LADDH d'Oran. Il condamne sans équivoque «tous ces coups de force contre la légalité et contre le libre exercice en matière de vie associative». «L'argument de non-conformité avec la loi ne tient pas la route une seule seconde», argue-t-il, «puisque c'est l'administration elle-même qui ne veut pas appliquer la loi quand les associations remettent le dossier de mise en conformité, en refusant la réception des dossiers ou en l'acceptant mais sans remettre le récépissé énoncé par la réglementation ou encore en remettant le récépissé mais en ne répondant jamais aux associations». Et de constater que les autorités semblent divisées : «La première qui dénonce les rapports faits par les diverses ONG, au niveau local et international, sur la situation des droits de l'homme en Algérie, rapports qui citent les différents dépassements. Et la deuxième partie dont la tâche est justement d'alimenter tous ces rapports en commettant les dépassements cités.» De son côté, le Civic (Comité d'initiatives et de vigilance citoyennes) parle de «hogra» : «La mise sous scellés des sièges des associations FARD et Afepec nous renseigne que les pouvoirs publics ne se sont pas encore départis d'une vision rétrograde, voire méfiante de la sphère associative. Ces pouvoirs ne veulent pas accepter une nouvelle approche de l'intérêt général dont ils ne sont pas les seuls détenteurs ; il en résulte des pratiques, de l'usage de l'administration et de la réglementation liberticide (loi 12-06 sur les associations) une perte des valeurs morales et sociales et du vouloir vivre-ensemble dans un Etat national. Le pouvoir joue avec le feu en domestiquant les associations et il ne fait que s'affaiblir lui-même en encourageant les groupes primaires et les idéologies fondamentalistes et obscurantistes. Notre postulat de toujours voudrait entendre qu'il ne peut y avoir de démocratisation de la société politique sans une démocratisation de la société civile. Autrement dit, il ne peut y avoir d'Etat fort sans une société civile forte.» La condamnation a pris une dimension nationale, puisqu'un collectif de plusieurs personnalités (les représentants du RAJ, Civic, Café littéraire de Béjaïa, la LADDH, le CFDA, le réseau Wassila et l'association Tharwa n'Fadhma n'Soumer) ont diffusé un communiqué de solidarité avec les deux associations féministes : «Les pouvoirs publics par cette décision réaffirment leur volonté d'étouffement et de mise à mort du mouvement associatif et des dynamiques sociales qui résistent encore au rouleau compresseur du pouvoir. Ces agissements confirment la logique d'exclusion méthodique et programmée des acteurs associatifs autonomes de la vie publique et aussi la fermeture des espaces d'expression et d'organisation.» Et de se désoler que la loi 12/06, depuis son entrée en vigueur en 2014, «continue de ravager le mouvement associatif qui subit le harcèlement quotidien». Le Café littéraire de Béjaïa, pour sa part, a émis un communiqué, où il déclare que «le combat de la femme pour sa liberté et sa dignité agace toujours le pouvoir et ses alliés, les intégristes, intimement unis pour réaliser leur projet de société rétrograde, obscurantiste, foncièrement inspiré de l'idéologie salafiste». Dans cette logique, le Café littéraire de Béjaïa condamne cette décision et «appelle à la levée immédiate de l'interdiction administrative et policière qui s'abat sur ces deux associations». Enfin, il est à savoir qu'à l'heure où cet article est mis sous presse, les représentantes de ces deux associations se concertaient en vue de publier un communiqué commun, où il sera notamment question des actions à entreprendre pour dénoncer ces mesures de l'administration.