Le rôle des Collectivités locales dans le développement économique est devenu le serpent de mer du programme du gouvernement. On se réfère, une à deux fois par an, aux communes et aux élus locaux pour dénouer la crise dans laquelle se débat le pays depuis la chute des revenus pétroliers. Cela ne peut traduire que l'échec endémique des plans de relance et autres nouveaux modèles de croissance tracés par les différents Exécutifs. Sans attendre les résultats des premières orientations, le gouvernement vient de placer la barre très haut en exhortant les communes à recourir aux «énergies propres et renouvelables». Il est difficile de connaître le degré de conviction des autorités dans ce nouveau plan d'action, mais il est aisé de comprendre que l'Etat ne peut plus payer les factures d'électricité des collectivités locales. Sans s'attarder sur les modalités de la transition énergétique suggérée par les pouvoirs publics, qui, du reste, ne l'ont guère esquissée au niveau central, les élus locaux saisissent très clairement cette injonction : «Eteignez les lampadaires !» C'est donc quasiment dans le noir que les collectivités locales vont devoir prospecter les voies et moyens de valoriser leurs «atouts de développement», comme cela a été formulé par le ministre de l'Intérieur, jeudi dernier, au terme d'une conférence sur l'efficacité énergétique. Pour étayer cette démarche, on promet de consolider les prérogatives des élus locaux dans le projet de loi relatif aux collectivités territoriales. Le texte en préparation prévoit, en substance, d'«activer le rôle économique de la commune et instituer un nouveau système de fiscalité locale». En théorie, le dispositif est bien réglé et il suffira d'attendre les retombées inespérées dans le grand chantier, à peine entamé, du redressement national. En pratique, l'état des lieux inspire moins d'optimisme. Et les rencontres avec des partenaires d'outre-Méditerranée pour créer des «pôles de prospérité» n'y feront rien. Pour avoir été trop longtemps combattues, les initiatives de partenariat et de jumelage entre les villes ne peuvent pas être relancées de sitôt. Dans les faits, les collectivités locales reproduisent, présentement, très exactement les travers des institutions centrales. Elles ne sont pas des îlots d'efficacité et de compétitivité mais des instances bureaucratiques en puissance. Elles ne sont pas prêtes à être dotées d'un chargé de l'énergie (renouvelable) lorsqu'elles n'ont pas pu renouveler les contrats du filet social pour les employés des cantines scolaires. Comme au niveau central, les collectivités locales gèrent au jour le jour, improvisent des solutions de replâtrage quand monte la colère des citoyens. L'impasse nationale est éprouvée au niveau local. Les populations attendent prioritairement l'avènement des villes propres avant «l'énergie propre». Les responsables locaux préfèrent consacrer la moitié de la semaine à des cérémonies inutiles et coûteuses en lieu et place de recevoir et accompagner consciencieusement les opérateurs économiques. Dans les assemblées élues, la formation des exécutifs constitue majoritairement une fin en soi. La crise que vit le pays a ceci de dramatique qu'elle a imprégné et ronge tous les démembrements de l'administration publique. Le sursaut et la relance viendront nécessairement des forces totalement autonomes, jeunes, qui recréeront des ambitions éteintes au sein des institutions.