Depuis un peu plus d'une semaine, des centaines de spectateurs s'agglutinent en fin de journée autour du stade scolaire d'El Kala pour ne pas rater une réédition du mémorable coup de tête qui a clôturé le Mondial 2006. A une différence près, c'est qu'il s'agit cette fois de béliers magnifiquement encornés et superbement toilettés. Comme chaque année, à la même saison se tient à El Kala le championnat des béliers. Des joutes organisées depuis une bonne quinzaine d'années par des jeunes qui ont le mérite de renouveler chaque année cette compétition sans se laisser « récupérer » par les pouvoirs publics comme cela a été le cas, tient-on à le rappeler à El Kala, pour la fête du corail. Fidel, Djebbar, Ben Laden, Saddam, Barrage, Tadj, Le Fou, Hachara, Douga Douga, Babaye... Trente-six béliers en tout ont été retenus pour ce championnat après de rudes éliminatoires. Au rythme de deux combats par jour, les épreuves doivent désigner les deux finalistes qui se rencontreront la veille de l'Aïd. Une finale qui clôture le championnat en apothéose. Elle est célébrée dans une liesse digne des grandes rencontres sportives. Le bélier gagnant et son propriétaire sont conduits par un cortège à travers les rues de la ville, précédés du tbal et de la zorna. Des cortèges de voitures, il y en a déjà puisque tous les jours les pugilistes sont amenés dans l'arène aussi bruyamment. Ces moutons ne sont jamais sacrifiés le jour de l'Aïd. Plus tard, lorsqu'ils ne seront plus en mesure de combattre, ils sont cédés à des waâdas ou vendus pour les fêtes. Leurs acquéreurs déboursent des sommes incroyables. Le dernier d'entre eux ne se paye pas en dessous de 50 000 DA. Antar, la vedette de cette année, a été acheté 300 000 DA, oui trente briques. Son propriétaire déçu et humilié par Métrez qu'il a acheté 170 000 DA, s'est payé Antar qui vient des Hauts-Plateaux pour rencontrer prochainement Ghannouchi qui lui vient de Tabarka (Tunisie). Eh oui ! Parce que le championnat s'internationalise. Mais, comme pour le foot, celui qui déplace les foules, c'est Zidane. Son propriétaire a été bien inspiré de lui donner le nom de la star mondiale. Zidane attend celui qui osera le défier et ce sera fatalement, quel que soit le nom qu'il porte déjà, Materrazzi. Et il doit lui donner ce coup de tête unique qui le mettra à terre. Dans le cas contraire, la déception serait énorme, beaucoup de spectateurs seront inconsolables car les combats de béliers ont leurs « mordus ». Ils sont de tous les âges, de 7 à 77 ans. Paradoxalement, ce sont les plus vieux qui sont les plus passionnés et leur colère ou leur joie, qu'on croirait feintes, sont réelles et profondes. Il n'y a pas un sou qui s'échange dans le championnat, assurent Fethi Zaâbat et Yassine Touam, qui sont depuis toujours les organisateurs de ces tournois. Tout est gratuit, nous cotisons pour payer la corde qui entoure le stade et pour acheter la coupe. L'organisation est impeccable. On a tout prévu. Il y a même une sorte de tribune d'honneur où se tient un mouton à l'allure altière, court sur pattes avec plusieurs tours de corne, à la robe marron clair comme un burnous, encadré par 4 jeunes au look de Men in black. Il ne combat pas, il reçoit les adversaires qui doivent le saluer avant de se battre, il donne le coup d'envoi et il récompense les gagnants. On l'a appelé... Boutef. El Tarf De notre correspondant