Organisations chrétiennes et ordres religieux occupent une place de choix au 7e Forum social mondial (FSM) de Nairobi, qui s'avère beaucoup « moins politique » que les précédentes éditions. Des Franciscains, reprenant à leur compte le slogan altermondialiste « Un autre monde est possible », des religieuses invitant les participants à venir « prier » devant une grande tente blanche qui fait office d'église sur le site du FSM et des Pentecôtistes, pas du tout discrets. Décor inédit qu'offre ce forum de Nairobi. « Nous avons un rôle de cohésion sociale à jouer dans un monde qui compte 10% de riches et 90% de pauvres, mais cela dépasse notre ordre : toutes les religions doivent faire bloc contre la pauvreté, c'est leur mission », explique Hermann Boarg, un Franciscain allemand qui estime « avoir sa place » dans ce FSM. Absence très remarquée, d'autre part, des musulmans, des juifs ou des Hindous à ce forum, qui sert de cadre au lancement par l'association catholique internationale Caritas de plusieurs campagnes, dénoncant notamment l'état des prisons en Afrique. Le Secours catholique a quant à lui mis l'accent sur le sort des réfugiés ou le lien entre éducation et développement. « On s'était préparés à cette très forte présence des religieux et au risque de récupération politique », reconnaît Taoufik Ben Abdallah, membre du comité d'organisation et du Conseil international des FSM. Le Kenya est chrétien à 70% et les organisations religieuses y sont très actives, au plus près de la population, notamment dans les nombreux bidonvilles qui entourent la capitale kenyane. Les premiers FSM organisés au début des années 2000 à Porto Alegre, au Brésil, un pays où la foi catholique est présente, avaient cependant laissé la part belle aux syndicats et organisations qui privilégiaient une dénonciation politique de la mondialisation. « Au Brésil, il y a une vraie tradition de solidarité, de travail en commun et de résistance politique, c'est toute la différence », note Moema Miranda, membre brésilienne du Conseil international des FSM. Organisateurs et militants altermondialistes se refusent toutefois à critiquer ouvertement l'imposante présence chrétienne à ce 7e forum mondial. « Chaque forum a sa couleur : celui-ci est moins rouge que ceux de Porto Alegre ou de Caracas en 2006 », commentait hier le porte-parole de la Ligue communiste révolutionnaire (France), Olivier Besancenot. Selon lui, « c'est la force du mouvement altermondialiste que de regrouper des mouvements très radicaux et des courants plus modérés qui cherchent à réguler la mondialisation ».