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Après la signature par l'Algérie de la convention pour la protection des personnes contre les disparitions forcées L'impunité reste de mise, selon les proches des disparus
La signature, le 6 février 2006, par l'Algérie de la Convention internationale pour la protection des personnes contre les disparitions forcées soulève chez les proches des disparus et les militants de défense des droits humains plusieurs interrogations. Pour Nacéra Dutour, contactée hier et qui s'exprime au nom de SOS Disparus et du Comité des familles des disparus en Algérie (CFDA), il existe une « contradiction entre les droits ouverts par ladite convention - une fois ratifiée - qui criminalise la disparition forcée et les dispositions de la charte pour la paix et la réconciliation qui interdit toute poursuite contre les auteurs présumés de disparitions forcées ». Appelant à intégrer la disparition forcée comme crime dans les lois algériennes, Nacéra Dutour a, par ailleurs, estimé que « l'Algérie a toujours signé des conventions sans que cela change grand-chose : les autorités signent volontiers cette convention tant qu'elles savent que personne ne viendra leur rappeler leurs engagements ». Safia Fahassi, du Comité national des familles de disparus (CNFD) s'est félicitée de la signature de la convention et espère que l'Algérie ratifiera au plus vite ce texte. Mais elle a regretté que « les autorités manquent de volonté pour s'attaquer au problème de fond : la vérité sur les disparitions forcées ». Si la charte a proposé d'indemniser les proches de disparus, il n'en reste pas moins, pour Mme Fahassi, que « cela n'est en aucune mesure comparable à la vraie demande des familles : des sépultures pour leurs proches pour désamorcer les haines à venir ». La signature de la convention, selon maître Boudjemaâ Ghechir, de la Ligue algérienne des droits de l'homme (LADH), est une « avancée », rejoignant l'avis de Farouk Ksentini, président de la Commission nationale de protection des droits de l'homme (CNCPPDH, officielle). Ce dernier a estimé, hier, que l'Algérie « ne pouvait aller plus loin ». Mais Ghechir est plus nuancé : « Il y a une différence entre le discours et la réalité. D'ailleurs, le gouvernement ne s'engage en rien tant que la convention n'a pas été ratifiée. On a vu l'interdiction du séminaire qui devait regrouper aussi bien les proches de disparus que les victimes du terrorisme (rencontre prévue le 7 février à l'hôtel Mercure d'Alger sur la question de la vérité et de la paix et interdite par les services de sécurité) ». Eric Goldstein, directeur Moyen-Orient-Afrique du Nord à l'ONG Human Rights Watch (HRW), contacté hier, a indiqué que l'on s'attend à ce que l'Algérie prenne au sérieux son engagement. « Mais c'est tout le contraire qui s'est produit à Alger, le lendemain de sa signature, quand les autorités ont empêché la tenue du séminaire. Or, la convention que l'Algérie a signée la veille garantit le droit de créer et de militer librement dans les associations concernées par le sort des personnes disparues », a-t-il ajouté, rappelant que « l'Algérie figure parmi les pays où les disparitions, perpétrées par les agents de l'Etat, ont le plus sévi dans les années 1990, et où ces crimes - désignés par la convention comme des crimes contre l'humanité s'ils sont perpétrés de façon systématique - restent impunis. Cette impunité a été codifiée par une amnistie promulguée en 2006 qui viole entièrement l'esprit de cette convention ». D'autant plus que, comme l'a souligné Mme Fahassi, la promulgation de la charte n'a pas pour autant arrêté le cycle des disparitions forcées. Ce qu'appuie Mohamed Smaïn du comité directeur de la Ligue algérienne de défense des droits de l'homme (LADDH) dans un communiqué parvenu hier à la rédaction, où il rappelle que les proches de A. Brahim, 24 ans, enlevé par des individus en tenue civile, venus à bord d'un 4X4 blanc en plein jour devant son domicile à Tiaret, le 27 novembre 2006, sont restés sans nouvelles de lui. Autres cas de disparitions forcées concernant trois ressortissants algériens extradés de Londres et appréhendés par des agents de l'Etat à l'aéroport d'Alger, fin janvier 2007, selon un communiqué d'Amnesty International, daté du 2 février 2007.