Le tribunal correctionnel de Béjaïa a condamné, hier, l'ex-directeur de l'OPGI de Béjaïa et Noureddine Lakelak, responsable du bureau d'études BAI, à trois ans de prison ferme, une amende ferme de 500 000 DA chacun, des dommages et intérêts de 5 millions de dinars et près de 95 millions de dinars à reverser au titre de dédommagement de la somme dilapidée. « C'est un procès de règlement de comptes personnel », a lancé maître Boudina, avocat de l'ex-DG de l'OPGI, qui a parlé de « forces de médiocrité » et réclamé à voir le rapport de la commission d'enquête, à l'origine du dépôt de plainte. En délibéré depuis mardi dernier, le procès avait été ouvert sur la base d'une plainte déposée par le ministère de l'Habitat qui s'est constitué partie civile et réclamant un dédommagement de 30 millions de dinars. L'expert désigné par la justice avait conclu à un déficit de 56 millions de dinars alors que le Centre national d'assistance technique (CNAT) en a calculé, lui, 74 millions de dinars. Une différence que l'expert a expliquée par l'impossibilité de disposer de toutes les pièces nécessaires pour son expertise. Le ministère public, de son côté, avait requis 5 ans de prison ferme et une amende de 1 million de dinars pour chacun des deux accusés poursuivis pour les chefs d'inculpation de passation de marchés contraire au code des marchés publics et dilapidation de deniers publics. Un lourd verdict pour la défense qui entend interjeter appel en s'appuyant sur l'argument de la prescription conformément à l'article 8 du code des procédures pénales. « Cette question n'est pas encore tranchée », estime maître Oulagha, l'un des deux avocats de M. Lakelak, qui explique que les trois ans de prescription sont largement dépassés du fait que « la plainte a été déposée en 2003 pour des faits qui remontent à 1995 ». Ce que réfute l'avocate de la partie civile, Me Kertous. « L'affaire a été qualifiée en criminelle sur la base de l'article 119 du code des procédures pénales où la prescription est de 10 ans. Ce n'est qu'en 2006 que les faits ont été requalifiés pour passer à une affaire délictuelle conformément à l'article 26 de la nouvelle loi 06/01. Dans ce cas, ils peuvent bénéficier des circonstances atténuantes mais pas de la prescription », argumente-t-elle. En 1995, l'OPGI avait signé un contrat d'étude, de suivi et de pilotage avec le bureau d'études BAI pour la réalisation de logements à El Kseur (144), Sidi Aïch (70) et Tichy (46). La même année, le ministère de l'Habitat a diligenté une commission d'enquête qui a conclu, dans un rapport que la défense dit ne pas retrouver, à une perte de plus de 100 millions de dinars. Une somme dilapidée qui tranche avec celles avancées par l'expert judiciaire et le CNAT. Le ministère de l'Habitat accuse l'ex-directeur de l'OPGI de s'être désisté de ses prérogatives concernant la maîtrise, le suivi et le contrôle du projet. « Ces missions reviennent à l'OPGI. Le contrat de pilotage n'existe pas dans la réglementation ; il a été crée », a soutenu Me Kertous. « Pourtant BAI a signé un contrat similaire avec l'EPLF sur le même site de Bechiche et on n'a pas trouvé à redire », s'est exclamé Me Oulagha. La partie civile a soulevé le grief de la surfacturation, constaté par le CNAT, de « 70% par rapport aux coûts réels du marché sur les factures présentées par BAI pour le cas du projet de 70 logements de Sidi Aïch ». Une accusation que rejette la défense mettant plutôt en avant la réduction par BAI du mètre carré habitable de 28 000 DA à 14 000 DA et rappelant que « le ministère en a fait une norme ».