Une station baptisée 17 octobre 1961Cette inauguration mettra en lumière l'impact de la fracture coloniale sur la société française d'aujourd'hui au moment où les références au colonialisme polluent les discours électoraux des responsables politiques », soulignent les initiateurs de cette opération. Celle-ci s'inscrit dans le cadre d'une « semaine anticoloniale » prévue du 17 au 25 février, avec au programme diverses activités visant à « faire le lien entre les mémoires des luttes pour la décolonisation d'hier et l'impact de la colonisation dans la société française d'aujourd'hui ». La station de métro 17 Octobre 1961 (prolongation de la ligne 13) contribuera à cristalliser et à perpétuer cette mémoire pour les générations futures, à construire une nouvelle citoyenneté pour la dignité et l'égalité de toutes et tous. Pour les citoyens français, immigrés, agir au niveau des symboles, de la reconnaissance, faire ressurgir leur histoire sociale, culturelle, familiale n'est certes pas suffisant, mais cela constitue néanmoins une étape nécessaire, source de dignité, moment fondateur de l'égalité. Mourad Slimani pour l'Unade et la section d'Asnières-Gennevilliers de l'association les Oranges avait adressé un argumentaire en faveur du baptême de la station de métro Asnières-Gennevilliers II du nom du 17 Octobre 1961 à la RATP où il écrit : « Inscrire la mémoire des événements du 17 Octobre 1961 dans l'espace public à travers une station de métro, ce serait reconnaître cette mémoire comme partie intégrante de la mémoire nationale. Ce serait contribuer à déconstruire l'injonction paradoxale qui résulte d'une perception de la diversité comme étrangère à la communauté nationale. » Dans une correspondance datée du 2 octobre 2006, la RATP refuse la proposition avec l'argument qu'elle ne répond pas aux critères de la charte de dénomination. Cette initiative lève le voile sur le « trou de mémoire colonial » de la société française. L'histoire, pour être apaisée, doit être reconnue et sortie de l'occultation. C'est le combat contre l'amnésie coloniale qui est préconisé. Le massacre du 17 octobre 1961 désigne la répression ayant frappé une manifestation pacifique en faveur de l'indépendance de l'Algérie à Paris. Selon les estimations, environ 325 Maghrébins sont morts sous les coups de la police française, alors dirigée par le préfet de police Maurice Papon (décédé hier à Paris). Des dizaines de manifestants ont été jetés dans la Seine, tandis que d'autres sont morts dans des centres de détention dans lesquels ils sont restés enfermés pendant quatre jours. La réticence de l'Etat et de la société civile à reconnaître jusque-là les crimes du 17 octobre 1961 témoigne plus profondément de ce que l'histoire de la colonisation reste à écrire. Cette histoire n'est pas du ressort des seuls historiens : il appartient à la société tout entière de la mener, car la société tout entière est aujourd'hui encore structurée par cette histoire coloniale. Cette inauguration est peut-être quelque part un premier pas vers une reconnaissance officielle.